2 janvier 2021 Epiphanie. « Mon Dieu je vous l’offre ».

 Frères et sœurs, un prêtre raconte un beau souvenir d’une messe en familles avec plein d’enfants. En cette fête de l’épiphanie, cette année-là, tout commençait très bien. Les enfants avaient bien repéré l’Étoile. Ils avaient bien vu que l’on pouvait se perdre en chemin, chercher sa route, et donc pour s’en sortir faire confiance à l’étoile, à ce qui éclaire la nuit. Ils avaient bien dit qu’à la crèche il y avait un grand caravansérail avec plein de gens différents, les riches mages et les pauvres bergers, ceux qui savaient beaucoup de choses avec la tête et ceux qui savaient beaucoup choses avec le cœur. Ils avaient dit aussi qu’il devait faire bien froid mais qu’avec un bébé il y a toujours de la joie qui réchauffe. Et puis est arrivée la question de l’or de l’encens de la myrrhe apportés par les mages et par glissement les cadeaux que nous-mêmes nous pouvions apporter à Jésus. C’est là que les choses se sont compliquées. Les réponses classiques et attendues étaient bien là, rapidement. On pouvait offrir à Jésus son sourire, son cœur, sa prière. Et puis, tout d’un coup comme un éclair dans le ciel, un des enfants a crié « On pourrait lui offrir les cadeaux qu’on a reçus! ». Il y eut un silence un peu gêné. Les plus âgés sentaient qu’il fallait dire « oui » mais que c’était faire un très gros sacrifice. Alors le plus jeune a dit « euh … en tout cas, pas mon vélo, car c’est mon cadeau de noël que je préfère! » Tous les enfants se regardaient alors presque effrayés ! On ne savait plus ce qu’il fallait penser.

Les enfants, qui sont sans filtre, posent, souvent, les bonnes questions. Que voulez-vous offrir à Jésus ? S’il vous fallait donner le meilleur de vous-même, que vous resterait-il ? Ne serait-ce trop « gros » comme sacrifice ? Une jeune fille va trouver le prêtre aumônier de leur groupe scout. Elle lui dit : « je n’arrive plus à dire le Notre Père. » « Oui, répond le prêtre (quand on est prêtre, il ne faut pas manifester son émotion en disant : Ah bon ?!)  … Vous butez sur une demande ? » « Oui ! … » « C’est : pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons… ? » « Non… ». Elle lui dit : « Voilà, c’est : que ta Volonté soit faite. » « Qu’est-ce que vous redoutez dans sa Volonté ? » « J’ai peur qu’il m’appelle à être religieuse et je n’en ai pas envie. » « C’est une caricature de Dieu. La Volonté de Dieu, on la découvre dans nos bons désirs. Le plus difficile pour nous n’est pas forcément notre voie. Il vaut mieux être un petit prêtre diocésain heureux qu’un moine chartreux dépressif. »  Cette jeune fille a rencontré un beau jeune homme, ils se sont mariés et ils ont eu de nombreux enfants : L’espace scénic ne suffit pas.

On résiste « naturellement » à offrir au Seigneur notre santé, notre famille, nos amis, et tout ce qui vient réchauffer et éclairer nos vies parfois froides. Si on lui offre ce qui nous tient à cœur, comment allons-nous nous en tirer ? C’est sans doute une très vieille trace du péché que de croire que vouloir offrir le meilleur de soi à Dieu, l’auteur de la vie, et de ma vie aujourd’hui, ce serait se perdre, se « sacrifier » dans le sens se liquider, disparaître, s’anéantir. C’est là en fait une erreur de perspective spirituelle. Quand on offre à Dieu le meilleur, il ne le dissout pas, mais il le perfectionne encore, il l’ajuste à son Projet. Il le rend encore meilleur, plus haut, plus généreux. Comme l’or purifié, Dieu enlève au meilleur que l’on offre ce qui reste encore d’égoïsme et de repli du péché. Donc osons, en ce début d’année, offrir à Dieu le meilleur …

Mais aussi à l’autre bout de la chaîne ce qu’il y a de moins beau, de moche, en nous. Là aussi, on a beaucoup de résistance. Une année dans un couvent de Dominicains, les frères ont vu apparaître au milieu des moutons et des agneaux de la crèche, un canard. Le prieur, le frère Denis, lors d’un café communautaire veut en connaître l’origine. Le vieux frère Maurice, au regard bleu et au sourire d’enfant a reconnu en être l’auteur. Un canard à la crèche, parce que, dit-il, « les fausses notes ont aussi le droit d’y être ». Et c’est ainsi que chaque année la crèche de Lille à son canard. Non seulement parce que le canard est la fausse note mais aussi parce que l’on sait que des vilains petits canards deviennent aussi des cygnes, des signes par grâce.

Nous sommes appelés véritablement à nous offrir en hostie vivante, à offrir notre vie, à nous donner totalement, tout ce qu’on n’a pas donné est perdu pour l’éternité, tout ce qu’on n’a pas donné est perdu pour Dieu. Et à donner d’abord tout ce qui nous pèse le plus; notre pauvreté, notre misère, nos défauts, nos problèmes. Saint Jérôme, c’est un Père de l’Église qui a traduit la Bible, un immense intellectuel. Mais il avait un caractère de cochon, il était colérique, il engu…irlandait tout le monde.  Un jour Jésus lui apparaît et lui dit : « Jérôme, que peux-tu me donner ? – Je t’ai tout donné, mes talents … et toute mon intelligence est pour toi – Mais tu ne pourrais pas me donner quelque chose encore ? – Mais je t’ai donné ma vie, toute ma vie est à toi, tu peux la prendre, je peux être martyr si tu veux, tout ce que tu veux par ta grâce, prends tout – Mais tu ne pourrais pas me donner quelque chose.
– Toutes mes richesses, tout ce que j’avais, mes biens, je t’ai tout donné. Regarde je vis dans une grotte, j’ai plus rien du tout. – Tu n’as pas quelque chose d’autres à me donner.- Ma colère ! – Alors donne-là moi, De cette colère, j’en ferai le Royaume des Cieux. »

Offrons nos « canards », nos colères, tous nos combats au Seigneur. « Mon Dieu je vous l’offre ». Amen !

Baptême du Seigneur – Dimanche 9 janvier 2022 – Les Carmes

Frères et sœurs, Le jour du Baptême de Jésus, le Saint-Esprit apparaît sous la forme d’une colombe. Pourquoi ? Quand on interroge les jeunes sur ce qu’elle nous dit de l’Esprit-Saint, ils répondent immédiatement : « La paix. » Et c’est vrai que l’Esprit-Saint est présent à coup sûr là où des personnes font la paix. Si on approfondit un peu plus, ils disent : « La liberté, comme une colombe en plein vol » ; « la pureté, comme la blancheur de son plumage » ; « la délicatesse, comme un oiseau qui se pose sur le sol » ; « la beauté, comme la finesse de sa forme. » Tout cela est vrai mais, dans la Bible, ce n’est pas le sens premier. La colombe apparaît après le déluge auquel a survécu Noé et sa famille. Puis dans le Cantique des Cantiques : « Que tu es belle ma bien-aimée, que tu es belle ! Tes yeux sont des colombes » (Ct 1,15). Et encore : « Ma colombe blottie dans le rocher, dans le secret de la falaise, montre-moi ton visage, fais moi entendre ta voix, car ta voix est douce, et ton visage est beau. (Ct 2,14) » Nous la retrouverons entre les mains de la Vierge Marie et de Joseph au Temple : c’est l’offrande des pauvres pour rendre grâce à Dieu et lui consacrer le nouveau-né (Luc 2,24). Et enfin, … au baptême de Jésus. La colombe est donc le signe d’un renouveau radical (Noé), d’une connaissance lumineuse et perspicace, d’un rayonnement exceptionnel (les yeux), d’un amour à la fois fort et tendre. Voilà pourquoi la meilleure manifestation que nous ayons du Saint Esprit, c’est celle qui transparaît sur le visage humain.

Toute la Bible ne parle que d’une seule représentation de Dieu. Un prêtre raconte que la fille de ses amis, Anne, onze ans, vient lui montrer son cahier de catéchèse. On lui a recommandé de l’illustrer. Quand le Père Gérard en a tourné toutes les pages, elle lui dit : « Si tu trouves des photos de Dieu, tu me les garderas ? »  Le Père Gérard dit qu’il est resté silencieux et souriant. Il n’avait jamais pensé à cela ! En fait, nous n’avons pas de photos de Dieu sur papier mais nous avons mieux que cela, une image : Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance.

Quelle est la différence entre Jésus et chacun de nous ?   Une petite préposition ; une seule petite lettre avec un accent grave : il ne s’agit même pas d’une consonne, mais d’une petite voyelle : saint Paul dans son épître aux Colossiens (1,15) dit que « le Christ est l’image du Dieu invisible.» Chacun est à l’image de Dieu. Jésus, lui, est «  l’image de Dieu. »  Sans préposition. « Être à l’image de Dieu », c’est non seulement le représenter, mais le rendre présent d’une certaine façon, c’est donner une idée, une approximation de ce qu’est  Dieu. Jésus est « l’image de Dieu » parce qu’il rend visible son Père. L’épître aux Hébreux dit qu’il est le « resplendissement de sa gloire, l’effigie de sa substance » (He 1,3). Saint Paul ajoute : « En lui réside corporellement la plénitude de la divinité » (Col 2,9).  Un de mes professeurs de théologie, le Père Gustave Martelet, expliquant cette différence entre le Christ et les autres hommes, disait : « Le Premier-né de toute créature, c’est le Christ. Le commencement, c’est le Christ. Le Premier de la série, c’est Le Christ. L’Alpha, (première lettre de l’alphabet grec) c’est le Christ. Ce n’est pas Adam. » Et il ajoutait : « Adam n’est que  alpha ’ (alpha prime) » …  Un étudiant malicieux a apporté une correction en disant : « Il vaudrait mieux dire que « Adam est Bêta. »  (C’est la deuxième lettre de l’alphabet et cela signifie aussi : un peu sot). » Le prototype, c’est Jésus. Nous sommes à l’image de l’Image de Dieu.

On a d’ailleurs dit de l’Esprit-Saint qu’il était « une Personne en plusieurs personnes »… Dieu est une Nature en trois Personnes. Le Fils est une Personne en deux natures. Le Saint-Esprit est une Personne en d’innombrables personnes.

 Le sacrement de baptême,  c’est un peu comme ce qui se passe dans un laboratoire de photographe. Vous connaissez le principe pour développer des photos. Après avoir pris soin d’être dans le noir, on prend un papier que l’on appelle sensible. Pendant un court instant, on expose sur ce papier, le négatif qu’un jet de lumière traverse. Après cette première opération, si on regarde le papier sensible, rien n’est changé, rien n’est apparu, le papier sensible est toujours blanc et cependant, on le sait, la photo est là, bien qu’invisible. Il faut que le papier soit plongé dans un bain, que l’on appelle le révélateur, pour qu’alors sous nos yeux, progressivement, les contours de la photo puis chacun des détails apparaissent. Le jour du baptême, il se passe la même chose : la photo de Dieu est imprimée dans le cœur du bébé, de l’enfant ou de l’adulte, mais il faudra toute une vie pour que l’on voit à travers eux à quoi ressemble Dieu, pour qu’on puisse dire un jour : « C’est le portrait tout craché de son Père des Cieux.» Voilà tout le but de la vie chrétienne.

Regardons le visage de Mère Térésa. Regardons le visage imprimé sur le Saint-Suaire : un visage extrêmement paisible alors que c’est celui d’un torturé. C’est le visage de Jésus crucifié au moment où il ressuscite.  Observons les photographies de Charles de Foucauld depuis son enfance jusqu’à la veille de sa mort au désert de Tamanrasset, en passant par son visage bouffi de militaire intelligent mais dévergondé. Cette transformation spectaculaire, cette intériorisation, c’est l’ oeuvre du Saint-Esprit. Contemplons les visages de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, du frère Roger de Taizé, de saint Jean-Paul II, du Bienheureux Carlo Acutis,… Et nous verrons chez ces amoureux de Dieu, le Saint-Esprit. Amen !

Dimanche 16 janvier 2022 –  Les Carmes (première communion) 18h30 – Guitard 9h30.

Frères et sœurs, la clef pour comprendre ce miracle de Jésus est dans la première lecture, dans la prophétie d’Isaïe : « Comme un jeune homme épouse une vierge, ton Créateur t’épousera. Comme la jeune mariée fait la joie de son mari, tu seras la joie de ton Dieu ». Attention à nos imaginations : on peut se représenter Dieu comme un vieux vieux vieux monsieur assis sur un nuage, comme un marionnettiste tirant les ficelles, comme un inventeur génial penché sur son bocal de laboratoire. Il est désormais au plus près de chacun ; il veut nouer avec chacun  des liens semblables aux liens qu’un mari tisse avec sa femme tout au long d’une vie. Chacun vit de ce mystère,  chaque vocation le représente . « Les Dons de la grâce sont variés mais c’est toujours le même Esprit. » La palme d’or revient tout de même à nos sœurs religieuses. Ce qui définit le mieux une religieuse, c’est qu’elle est l’épouse de Jésus. Un enfant posait la question : Comment cela se passe ma sœur ? c’est vous qui montez ou c’est Dieu qui descend ? » C’est Lui qui est descendu et qui veut entrer en cœur à cœur, « comme un ami parle à son ami ». Une religieuse est la preuve vivante que Jésus est bel et bien ressuscité. En effet qui aurait l’idée de passer sa vie avec un cadavre, d’épouser un mort, de vivre avec une idée ? Quand on voit la joie d’une carmélite, la fidélité d’une sœur de Saint-Joseph, on ne voit pas d’autre explication qu’un coup de foudre qui n’en finit pas.

Les époux, eux, rendent visibles le mystère par leur sacrement de mariage. Leur foyer est la vitrine du Dieu Trine.  Il représente en même temps l’Alliance du Christ avec l’Eglise. Non seulement ils représentent cette alliance mais il la rendent présente.

Le prêtre, lui, représente Jésus-Epoux. La messe c’est un dialogue mystique. A la messe, Le Christ dialogue avec son épouse. Ils s’accueillent mutuellement par le chant d’entrée, elle demande pardon et  il lui pardonne. Dans les lectures, il lui fait confidence de son amour. Avec le psaume, il lui donne les mots pour lui répondre. Il se donne à elle : « Ceci est mon Corps livré pour toi. » Ceux et celles qui ne sont pas consacrés, qui ne sont pas mariés, ou qui sont veufs ou veuves vivent cette parole de Jésus : « Un jour l’époux leur sera enlevé et alors ils jeûneront ». Ils nous rappellent qu’il nous faut tout faire pour que tout le monde puisse passer sa vie avec Jésus, l’Epoux merveilleux qui change notre eau en du vin, qui transforme nos amours souvent plombés par le péché en de l’or, nos élans naturels en du surnaturel.

Que Jésus change 600 litres d’eau en du vin excellent nous dit combien Jésus veut apporter la joie. Alors, pour vous faire sourire, je vous raconte une anecdote sur chaque vocation. La religieuse. Un monsieur avait enterré son épouse. Quand monsieur le curé lui annonce le prix de la cérémonie, il dit qu’il ne peut pas payer. -« Mais vous n’avez personne pour vous aider ? -« J’ai ma sœur, mais elle a mal tourné. » -« Elle n’a pas mal tournée, votre sœur, puisqu‘elle est religieuse ; elle a épousé Jésus »,  -« He bien faites payer mon beau-frère » … !! Dans un jeu télévisé qui met au défi des couples, ce jour-là, le présentateur s’extasie devant la performance d’un couple. « Vous avez soixante ans de mariage ! Mais dites-moi : avec la même femme ?! Comment fait-on pour vivre avec le même homme, la même femme pendant plus d’un demi siècle ?! » Le monsieur a répondu très gentiment : « Vous savez : nous sommes de la génération qui répare ; pas de la génération qui jette » Et son épouse a renchéri délicieusement : « Et mon mari est un excellent bricoleur » ! Pour l’anecdote du prêtre, c’est surtout le vin des noces qui est à l’honneur. Un prêtre auxiliaire de 85 ans. Un dimanche, il prend part au grand « banquet des Anciens » offert par la municipalité. L’ambiance est à la fête ; il faut trinquer avec les uns et les autres ; il faut faire honneur à l’invitation de monsieur le maire. Malgré tout, en fin d’après midi il rentre chez lui au volant de sa voiture. Hélas, les gendarmes l’arrêtent pour un contrôle d’alcoolémie. Evidemment l’alcootest s’avère positif. Cependant, le gendarme indulgent ne lui met pas de contravention, mais il lui fait la leçon : « Mon Père, il faut arrêter de boire ! » Et le Père Jean B. lui répond : « Mais je n’ai plus soif » ( !…)

Vierge Marie, veille à ce  que chacun dans nos vocations nous soyons des diffuseurs de la Joie de ton Fils, notre Epoux. Amen !

3° dim. ord. C. Saint-Antoine 18h15 et 9h. La Parole de Dieu – Dimanche 23 janvier 2022

 Frères et sœurs, ce dimanche, il est beaucoup question du Livre des Ecritures Saintes. Dans la première lecture, on nous raconte l’émotion qui a saisi le Peuple hébreu le jour où, cinq siècles avant Jésus, on a retrouvé les parchemins des cinq premiers livres de la Bible. Ce jour-là, le peuple a écouté Esdras lire les textes sacrés depuis le lever du soleil jusqu’à midi !… Dans l’évangile, saint Luc précise avec quel soin il a rédigé son livre. Et nous venons d’entendre la place que tenaient les Ecritures Saintes dans la vie de Jésus : en lien  d’une part avec les événements tels qu’ils se présentaient, d’autre part avec cette intimité toute spéciale qu’il avait avec son Père dans la prière, il y puisait la lumière et la force pour sa Mission de Sauveur. Dès le début, à Nazareth, dans la synagogue où il venait depuis près de trente ans, tous les shabbats, c’est un passage du livre d’Isaïe qui le révèle comme le Messie, celui qui est tout imprégné de l’Onction du Saint-Esprit.

            C’est l’occasion de préciser ce qu’est pour nous, chrétiens,  la Parole de Dieu. Partons d’une question dans un sens pédagogique, pas polémique : Que répondre aux musulmans qui nous disent qu’il n’y a de Parole de Dieu que le Coran ? Lisez la Bible, nous disent-ils, et vous vous apercevrez vite que des passages entiers ne sont pas la parole de Dieu. Les 150 psaumes, par exemple sont des prières adressées à Dieu :  « Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour » « Tu me scrutes et me connais, Seigneur » etc etc… Par ailleurs, il y a de longs récits historiques, des recueils de proverbes, des paraboles, des livres entiers qui racontent des vocations de prophètes : ce sont clairement des paroles d’hommes sur Dieu ou à propos de Dieu… Dans le Coran au contraire, de la première à la dernière sourate, c’est Dieu qui parle en disant ce que l’homme doit faire.

Que répondre ?

Personnellement, si on m’avait demandé une comparaison pour expliquer ce qu’est la Parole de Dieu, j’aurais dit qu’elle est comme le code de la route avec des sens interdits, des sens obligatoires, des panneaux indicateurs. Elle nous permet de rester dans le droit chemin et d’arriver à destination. Curieusement, dans toute la Bible, il n’y a aucune comparaison qui ressemble à celle-ci.

La Parole de Dieu, ce ne sont pas que des directives ou des reproches qui tombent du ciel. C’est Dieu qui communique sa vie. Pour faire un jeu de mot, en nous parlant, Dieu se «livre» de plus en plus jusqu’à se faire l’un de nous. On peut comparer avec une maman : une maman ne parle pas à son enfant qu’en lui intimant des ordres, des menaces ou des conseils. Elle lui raconte des histoires édifiantes, elle lui apprend des prières, elle feuillette avec lui l’album de famille. Parce qu’en fait, en lui parlant, elle lui livre son jardin secret. De même le Seigneur nous parle en utilisant non seulement le mode prophétique (« Fais ceci, ne fais pas cela ;si tu fais ceci tu auras la vie éternelle ; sinon … », mais tous les genres littéraires.  

Par ailleurs, dans la Bible, il est écrit que la Parole de Dieu est comme la pluie qui descend du ciel pour féconder la terre, ou – mieux encore- comme la graine semée. Quelle puissance contenue dans une graine ! Que de murs bâtis pourtant pour l’éternité se lézardent et s’écroulent parce qu’un merle est venu y déposer une graine de sureau !!! Le Père André Manaranche résume tout par ce beau jeu de mots : « Dieu cause en causant ». Quand il nous parle, il agit. Sa parole atteint son maximum d’efficacité quand, à la messe, il dit par la bouche du prêtre : « Ceci est mon corps livré pour vous ». La Parole de Dieu a sa puissance en elle-même. Voilà pourquoi il faut lui donner une chance de nous transformer en lisant la Bible ou en venant l’écouter à la messe. 

On peut dire, pour simplifier que, pour l’islam, la Parole de Dieu est un livre (le Coran, dont il est dit qu’il est dans le ciel au pied de Dieu) qui est transmis par un homme (Mahomet). Pour les chrétiens, la Parole de Dieu est une Personne (Jésus qui est le Verbe Eternel, le Message éternel, la Parole éternelle du Père) une Personne transmise par un livre. Comme nous sommes dans la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, nous pouvons rappeler ce joli mot de Luther : « De même qu’une mère ne va vers le berceau que pour y trouver son enfant, ainsi nous n’allons vers la Bible que pour y trouver Jésus ». (Précisons aussi que pour un protestant, la Parole de Dieu est tout entière contenue dans la Bible (avec humour, ils disent qu’un protestant avec sa Bible sous le bras, c’est un Pape à lui tout seul), alors que pour un catholique, la Parole de Dieu lui vient par la Bible, interprétée authentiquement par le magistère des évêques unis au Pape, à la lumière de la Tradition vivante.)

Nos journées changent lorsque dès le matin, nous lisons les Textes du Jour dans notre Prions en Eglise, notre Parole et Prière, notre Magnificat, ou sur un des sites internet, et que nous y cueillons le verset que nous allons ruminer tout le jour. Aujourd’hui, par exemple, nous pourrions comme le faisaient la Vierge Marie et saint Joseph, et Jésus à Nazareth mâcher et remâcher un de ces versets:

  • Car ce jour est consacré à notre Dieu ! Ne vous affligez pas : la joie du Seigneur est votre rempart ! (Néhémie)
  • Seigneur, mon rocher, mon défenseur ! (Psaume)
  • Or, vous êtes corps du Christ et, chacun pour votre part, vous êtes membres de ce corps.(saint Paul)
  • L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Amen !

4° C. – Dimanche 30 janvier 2022 – Saint-Laurent

Frères et sœurs, quel lien pouvons-nous trouver entre ces trois lectures ? L’évangile met le projecteur sur la « souveraineté » de Jésus. Il en impose ! Tant que son heure n’est pas venue, personne ne pourra le jeter du haut de la falaise.

La prophétie de Jérémie l’annonce : « ils te combattent mais ils ne pourront rien contre toi. » En effet : « mais lui passant au milieu d’eux, allait son chemin. » D’où lui vient cette autorité ? Nous avons la clef dans la deuxième lecture.

Ce texte de saint Paul est certainement le plus beau qui existe sur l’amour. J’aurais beau parler toutes les langues. J’aurais beau pouvoir prédire tout ce qui va arriver. J’aurais beau avoir une foi à soulever les montagnes. J’aurais beau distribuer ma fortune aux affamés. Si je ne le fais pas par amour, je suis zéro. En effet, on peut faire des choses extraordinaires et en apparence généreuses non par esprit de sacrifice mais hélas, par orgueil, par jalousie, par ambition, ou encore pour de l’argent. (D’où le proverbe : on lui aurait donné le Bon Dieu sans confession… !) Disciples de Jésus, nous ne sommes pas plus malins. Mais nous avons Jésus comme exemple et comme ressource ! Et cela change tout !

Comme Jésus, un jour ou l’autre nous subissons la trahison, la calomnie, le mensonge, la lâcheté, le mépris, l’injustice, la mauvaise foi, les contrariétés en tout cas… Comme lui, nous devons tenir bon dans la droiture, le pardon. Comment cela ?

D’abord, il faut penser que, dans une vie, il y a un temps pour éviter d’être jeté du haut de la falaise, et un temps pour monter sur la croix. Il y a un temps pour éviter de s’exposer et un temps où il faut aller au « Combat ».  Il faut discerner.

Il faut se rappeler que notre vie sur la terre n’est qu’une préparation du Ciel. Les expressions de saint Paul sont extraordinaires : « Pour le moment nous voyons comme dans un miroir (à l’époque de saint Paul, les miroirs n’étaient pas aussi performants que les nôtres !). Au Ciel nous verrons Dieu face à face. Au Ciel, nous le connaîtrons comme Lui nous connaît aujourd’hui. » . Nous sommes en stage. Nous jouons notre vie éternelle.

Et puis surtout « recherchons avec ardeur les dons les plus grands. » Avec ardeur, écrit saint Paul. Un jour, Mgr Brincard a dit à un jeune qui venait de poser une question sur l’existence de Dieu : « Est-ce que l’Amour vient de toi ? Est-ce que tu es source de l’amour ? Si tu me réponds Oui, je vais te dire : alors pourquoi est-ce que tu n’aimes pas tout le temps, à tout moment ? Si tu me réponds Non, alors je vais te demander : Alors d’où vient l’amour ? » L’amour vient de Dieu. Il faut le lui demander avec ardeur.

Prenons une comparaison: J’ai un tube de gouache verte.- si j’ouvre le tube tout doucement avec délicatesse, il en sort de la gouache verte. -Si le bouchon me résiste un peu, je vais m’énerver, forcer et l’ouvrir avec mes dents et il en sortira de la gouache verte. -Si mes dents ne sont pas très en état, je prendre un cutter, entailler le tube, l’ouvrir tout grand et il en sortira de la gouache verte.- Si j’ai la haine en moi, que je suis fou furieux, je vais prendre un marteau et taper sur le tube, cela éclaboussera et il en sortira de la gouache verte.

Il en est de même de Dieu : -si je parle à Dieu avec amour et douceur, il sortira de lui de l’amour.- si je crie après Dieu  pourquoi ce qui m’arrive ?  etc, il sortira de lui de l’amour. si je blasphème, me moque de Dieu ou le laisse tomber ? il sortira de lui de l’amour -si je nie son existence, si je le refuse dans ma vie, si je le cloue sur la croix, il sortira de lui de l’amour ! Quoique tu fasses, Dieu t’aime. Dieu m’aime car je suis unique.

Un collectionneur échange des pièces rares contre d’autres pièces rares, s’il les a en double. Mais s’il a une pièce unique, il ne l’échangera pas. Dieu ne t’échangera jamais : Tu es unique. Il a un amour unique pour toi.  Mais il faut « ouvrir le tube » d’une manière ou d’une autre. Il y a ces deux versets de la Bible qui font frémir (Ap 3,15-16) : « Je connais tes actions, je sais que tu n’es ni froid ni brûlant – mieux vaudrait que tu sois ou froid ou brûlant. Aussi, puisque tu es tiède – ni brûlant ni froid – je vais te vomir de ma bouche. »

Le lien entre ces trois lectures, c’est Jésus-Amour. Frères et sœurs, nous venons faire le plein de Lui chaque dimanche. Pensons aussi que le sacrement de pardon nous est proposé chaque samedi matin, et chaque soir  à 17heures. Amen !