3 décembre 2023 Le temps de s’émerveiller Premier dimanche de l’avent
Frères et sœurs, assez facilement quand nous entendons AVENT, nous entendons avant Noël, le temps qui précède Noël. Mais Avent n’est pas le contraire d’après. C’est la contraction du mot AVènemENT. On parle de l’avènement de tel Roi, de tel grand personnage de l’histoire. C’est sa venue, son arrivée. Nous avons tout juste un peu plus de trois semaines pour entrer dans le mystère de l’avent, mystère qui est très bien exprimé par cette prophétie inouïe d’Isaïe : « Ah ! Si tu déchirais les cieux, si tu descendais ». Isaïe en a rêvé ; Le Seigneur l’a fait ! « Voici que tu es descendu […] Jamais on n’a entendu, jamais on n’a ouï dire, nul œil n’a jamais vu un autre dieu que toi agir ainsi pour celui qui l’attend. »
Quand Youri Gagarine est redescendu de l’espace, il a dit : « Je suis monté aux Cieux mais je n’ai pas vu Dieu ». Mais l’espace ce ne sont pas les Cieux ! Quand la Bible parle des Cieux – Dieu a créé la terre et les Cieux – le terme employé est « shamaïm » : ce sont les eaux d’en haut. Et nous, nous sommes les eaux d’en bas. Et Dieu sépare les eaux d’en haut des eaux d’en bas. Il y a une séparation entre la sphère divine et ce qui est créé. Conclusion : il nous est impossible d’accéder au Ciel. C’est une sphère différente de la nôtre. Comment faire pour rejoindre le Ciel ??! D’où l’exclamation d’Isaïe : « Ah si tu déchirais les Cieux, et si tu descendais ! » Dans un psaume nous avons aussi : « Quand pourrais-je m’avancer, paraître face à Dieu ? » Dans l’évangile aussi, nous avons ce souhait de l’apôtre Philippe à Jésus : « Montre nous le Père, cela nous suffit ». Mais inexorablement la réponse était celle du Livre de l’Exode : « Personne ne peut voir Dieu sans mourir ». La seule solution possible est arrivée : c’est le Mystère de l’incarnation. Dieu en Jésus a pris notre vulnérabilité ; il est entré dans nos limites. Il est venu vivre ce que nous avons à vivre. Il a connu la souffrance et même la mort. Isaïe pensait qu’il allait manifester sa Puissance avec éclat. Mais la Toute-Puissance de Jésus s’est manifestée et se manifeste dans l’Amour. Parce que c’est l’amour qui guérit, c’est l‘amour qui fait marcher les paralysés, c’est l’amour qui fait voir les aveugles, c’est l’amour qui ressuscite.
Suppose que ton rêve soit de mieux connaître un personnage fabuleux, vraiment formidable, dont tu as entendu parler et que tu admires. Pour certains ce sera une vedette sportive, d’autre une star de cinéma, d’autres un prix Nobel de la Paix. Si possible, tu voudrais même aller chez lui, pouvoir passer quelque temps avec lui. Mais tu ne sais ni où il habite, ni comment le contacter. Se présente alors un homme qui se dit l’ami de ton « idole». Il te parle beaucoup de lui et te donne son adresse. Il te conseille d’écrire, il te souffle les mots qui risquent de lui plaire. Voici un deuxième homme qui se dit aussi très ami avec celui que tu aimerais tant connaître et rencontrer. Ce deuxième te parle de lui. Et il te conseille de passer et repasser sous ses fenêtres. Peut-être fera-t-il attention à toi et t’invitera-t-il ? Attention, voici maintenant un troisième homme. « Je suis un super ami de celui que tu admires, te dit-il : je connais son numéro de téléphone. Je te conseille de l’appeler, plutôt le soir. Mais sois très poli avec lui. » Un quatrième arrive, très ami lui aussi. Il dit qu’il le connaît pas mal et te suggère de lui envoyer un cadeau, un beau livre par exemple. Il prétend que cela peut marcher et que ton « idole » pourra être touché et t’inviter à venir le voir. Mais si, par chance incroyable, celui dont tu rêves VIENT CHEZ TOI. S’il reste juste le temps de t’inviter de façon pressante à le suivre. Parce qu’il veut bien t’accueillir chez lui. Et non seulement pour quelques heures, mais, si tu le veux, pour toujours ! Car il te propose d’entrer dans sa propre famille. Si tu veux, il t’adopte et fait de toi un de ses enfants. Et donc, si tu veux, tu pourras vivre avec lui et te réjouir de tous ses biens, pour toujours ! Incroyable non ?
Dans l’évangile nous avons entendu plusieurs fois la consigne de « Veiller ». Nous pouvons entendre dans cette invitation répétée : nous éVEILLER à Sa Présence, nous émer-VEILLER » Un chant un peu ancien parle de la visite des Rois Mages à Jésus. La chanson dit notamment que les trois Sages étaient arrivés à la grotte avec amour en apportant leurs dons – l’or, l’encens et la myrrhe -, et qu’ils étaient accompagnés de beaucoup de serviteurs dont un clown. Cet homme, petit et vêtu de façon cocasse, n’avait pas été jugé digne d’être présenté à la Sainte Famille. Il était donc resté en arrière et un mur de personnes se dressait entre lui et l’Enfant Jésus. Comme il était petit de taille, il ne voyait rien et donc il faisait des bonds pour pouvoir voir Jésus. Son agitation faisait sonner les clochettes accrochées à son costume de bouffon. En entendant ce tintement, qui risquait de réveiller le nouveau-né, la Vierge a demandé qui en était responsable. Le mur de gens s’ouvrit et quelqu’un désigna le clown comme le responsable du tapage. La Mère du Sauveur lui sourit et, une fois reçus les cadeaux des Rois Mages, elle demanda à ce pauvre homme quel cadeau il avait apporté à Jésus. Le clown avait les mains vides, mais il répondit assez vite : « J’apporte ma capacité à m’émerveiller ».
Alors, cherchons à vivre le Saint Noël en cultivant l’émerveillement, en cherchant à nous émerveiller, avec gratitude parce que Dieu nous aime, au point de descendre au milieu de nous. Amen !
10 décembre 2023 Saint Jean Baptiste.
Frères et sœurs, il est le seul saint, avec la Vierge Marie, dont on ne célèbre pas la fête seulement au jour anniversaire de sa mort (29 août), mais au jour anniversaire de sa naissance, le 24 juin. C’est dire la place qu’il tient dans notre foi, la grandeur de saint Jean-Bapstiste.
Il est le fils de Zacharie et d’Élisabeth. Zacharie est un prêtre qui assure des fonctions au Temple de Jérusalem. Ils étaient environ 15000 qui avaient un lopin de terre dans les environs de Jérusalem. Chacun à leur tour, ils allaient pendant quinze jours, assurer le service au Temple pour accueillir les pèlerins, les faire prier, offrir les sacrifices. Jean était fils unique, il avait donc une situation en or. Il la laissera pour aller vivre au désert, en solitaire, en ermite, et de façon très frugale. (On dira qu’il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage). Il prônera un pardon des péchés par le baptême et non par les rites du Temple.
Comme celle de Jésus, la naissance de Jean est annoncée à Zacharie par l’archange Gabriel, qui lui dit que son fils à naître, Jean, sera rempli de l’Esprit-Saint et aura la puissance d’Élie. Sa maman est la parente, la cousine de Marie, la mère de Jésus. Les deux enfants se rencontrent par leurs mamans enceintes. Jésus est dans le ventre de la Vierge Marie depuis tout au plus, quinze jours. Jean depuis six mois. Rencontre bouleversante qui montre bien avant l’échographie que le bébé est une personne. En présence de Jésus, Jean saute de joie.
Jean grandit. Après avoir quitté Jérusalem, il s’installe sur les bords du Jourdain, où il pratique le « baptême de conversion » par immersion dans l’eau. Jean réunit autour de lui de nombreux disciples, leur annonçant la venue d’un personnage plus important que lui, le Messie : « Moi, je vous baptise avec de l’eau, pour vous amener à la conversion, mais vient celui qui est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de dénouer la courroie de ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit saint et le feu »
Jésus vient voir Jean pour être lui aussi baptisé. Jean lui dit : « C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi », et Jésus lui répond : « Laisse faire maintenant, car il faut que nous accomplissions ainsi tout ce qui est juste. » Jean baptise donc Jésus et c’est au sortir de l’eau que ce dernier voit « l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui (Mt 3,16) », tandis « qu’une voix venue des cieux disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, qui a toute ma faveur » (Mt 3,17). Jésus en recevant le baptême de son cousin, veut signifier qu’il vient prendre nos péchés sur lui. Et montrer au monde qui il est. On dira plus tard qu’il est la Deuxième Personne de la sainte Trinité : le Père le désigne comme son Fils bien-aimé et L’Esprit apparait sous la forme d’une colombe qui rappelle le renouveau après le déluge (entre autres).
Les premiers disciples de Jésus sont issus de l’entourage de Jean Baptiste : André, Simon-Pierre, Philippe, Nathanaël. Jean travaille pour Jésus. Quelle humilité il lui a fallu ! Jean reconnaît Jésus comme plus grand que lui. Mais il traversera une période de doute. Quand il sera emprisonné, de sa prison, Jean enverra quelques-uns de ses disciples pour « savoir à quoi s’en tenir sur le sens d’une prédication et d’un comportement [ceux de Jésus] qu’il trouvait sympathiques mais déroutants » . Jésus le renvoie à ses miracles.
Les quatre Évangiles citent, au sujet de Jean Baptiste, la prophétie d’Isaïe : (Is 40, 3) « Voix de celui qui crie dans le désert : rendez droit le chemin du Seigneur». il est de ceux qui comme déjà Amos ou Osée prennent fait et cause pour les petites gens qu’une interprétation rigoriste et outrancière de la Torah, ainsi que l’aliénation résultant de la domination romaine, écrasent. Ceux à qui il s’en prend avec le plus de virulence sont les dépositaires du pouvoir ainsi que leurs subordonnés, soldats, collecteurs d’impôts et autres publicains. Les autorités religieuses font aussi partie de ses cibles.
À l’époque de Jésus, la tradition juive s’attendait à ce que la venue du « Messie fils de David » soit précédée par le retour du prophète Élie mystérieusement élevé au ciel dans un char de feu (2R 2, 16). Ce nouvel Élie devait frayer un chemin pour préparer le grand jour de YHWH, en invitant les hommes à se convertir et en restaurant Israël. Dans l’Évangile selon Marc (Mc 9, 9-13) et celui de Matthieu (Mt 17, 9-13), Jésus le considère comme le précurseur : « Je vous le dis : Élie est bien déjà venu et ils l’ont traité à leur guise. »
Jean reproche à Hérode Antipas, tétrarque de Galilée et de Pérée, son union avec Hérodiade, l’épouse de son demi-frère. Hérode excédé par les critiques au sujet de son mariage, ordonne l’arrestation de Jean et « le fait mettre en prison». Sa femme Hérodiade voulait faire tuer Jean, mais Hérode Antipas le protégeait, car il le « connaissait pour un homme juste et saint » et « l’écoutait avec plaisir ».
Mais au cours d’un banquet, Hérode fait la promesse de donner à Salomé, la file d’Hérodiade tout ce qu’il lui demandera. Comme elle demande conseil à sa mère, celle-ci en profite. Elle demande la tête de Jean sur un plateau. Hérode n’ose pas la lui refuser. Jean meurt martyr de la vérité, décapité.
Rappelons-nous une de ses paroles, la plus belle : « Qui a l’épouse, est l’époux. Mais l’ami de l’époux qui se tient là est ravi de joie à la voix de l’époux. Telle est ma joie et elle est parfaite ». Décryptage : ma joie c’est de mettre en lien le plus de personne possible avec Jésus qui veut nouer avec chacune un lien aussi fort que celui entre un mari et sa femme. Notre religion est une relation. Et notre mission à l’instar de celle de saint Jean baptiste est une mise en relation. Voilà pourquoi nous rappelons une autre parole de saint Jean à chaque messe : « Voici l’Agneau de Die qui enlève les péchés du monde ». On comprend Jésus qui dit à son propos : « Amen, je vous le dis : Parmi ceux qui sont nés d’une femme, personne ne s’est levé de plus grand que Jean le Baptiste ; et cependant le plus petit dans le royaume des Cieux est plus grand que lui. » Amen !
3° dim. de l’avent 17 décembre 2023
Frères et sœurs, « Frères, soyez toujours dans la joie » ! nous dit saint Paul ! C’est un impératif présent. Comment être dans la joie avec l’actualité mondiale et les tensions que traversent nos familles, les drames parfois ?
Il nous faut penser plusieurs choses.
Il faut savoir d’abord que par rapport à la joie, nous ne sommes pas égaux. Un exemple : une maman raconte qu’elle avait mis une belle robe à sa petite fille, Myriam. La petit revient avec sa robe tâchée par du cambouis. « Tu as taché ta robe ». Myriam répond : « ça fait une décoration ! » Le lendemain, elle lui fait remarquer un accroc à sa jupe. Sa réponse: « ça fait une dentelle ! » Et cette maman, au-delà des problèmes de lessive et de raccommodage, finit par se dire : « Quel bonheur pour Myriam d’être si positive ! » Nous n’avons pas tous un filtre aussi positif ! Il y en a qui voient tout en noir, et d’autres qui voient la vie en rose. Mais le filtre naturel peut se corriger par du Surnaturel.
Deuxièmement, il faut distinguer bonheur et joie ; le dictionnaire définit le bonheur comme « l’état de la conscience pleinement satisfaite », un bien-être parfait. Dans ce cas, le bonheur ne sera qu’au ciel, car vous pouvez être pleinement satisfait chauffage de votre maison, mais qu’en est-il au niveau de la santé, au niveau professionnel, au niveau affectif, au niveau de la santé de vos proches, au niveau du souci que vous vous faites pour l’avenir de vos enfants, de vos petits-enfants, de la planète ? Sur l’ensemble, il y a forcément quelque chose qui cloche. En revanche, la joie peut cohabiter avec la souffrance. Jésus lui-même, parle plusieurs fois de sa joie pendant sa passion. « Ma joie, personne ne vous l’enlèvera » (Jn16,22) « Père je te prie pour qu’ils aient en eux ma joie parfaite » (Jn 17,13).
Troisièmement. Une anecdote que m’a raconté un ami prêtre a attiré mon attention sur un autre point. Le Père Samuel participait à une session régionale qui réunissait des jeunes prêtres. L’un d’entre eux, sur un ton excédé, dit au Frère Aloïs le frère Prieur de Taizé qui animait la rencontre : « « Y en a marre ! Le Pape nous demande d’être joyeux. Vous nous demandez d’être joyeux. Comment être joyeux quand la pratique ne cesse de baisser, quand les paroissiens se tirent dans les pattes, quand l’Eglise est montrée du doigt ? » Frère Aloïs a répondu : « Il nous faut faire comme Jésus ; lui aussi subissait l’adversité, les échecs, les déceptions. Mais il restait dans la Joie parce qu’il voyait une personne après l’autre. Il se réjouissait qu’un Zachée ait accepté de corriger sa vie, qu’une Marie Madeleine vive désormais dans la chasteté, qu’un légionnaire romain ait saisi que le vrai Sauveur n’était pas l’empereur mais Jésus, que Bartimée ait eu assez de foi pour demander la guérison de ses yeux et le suive, qu’une pauvre veuve mette toute sa pauvre fortune dans le tronc du Temple, etc… Il s’agit de se réjouir du bon travail que le Seigneur fait dans les personnes qui lui donnent la main, comme on dit à la belote, qui lui donnent le volant. Oui, il y a la guerre en Israël, mais le Seigneur a réussi à convertir Mehdi. Oui, il y a des tensions mais le Seigneur appelle des catéchumènes. Oui, il y a des risques que l’on autorise l’euthanasie mais il y a des chrétiens qui s’engagent pour le respect de la vie de façon héroïque.
Quatrièmement, la joie vient de la simple présence du Seigneur pas seulement de son action. Peut-être avez-vous vu ce dessin de Sempé, l’auteur des célèbres chroniques du petit Nicolas ? Sur ce dessin, on voit une dame seule à genoux sur un prie-Dieu, dans une immense cathédrale. Tournée vers le Ciel elle dit au Seigneur : « Seigneur, j’ai tellement confiance en vous que parfois, je vous appelle Docteur » !!
Une amie que je connais depuis son adolescence s’est retrouvée en prison en Pologne pendant deux ans, en raison d’un accident de la route où l’un des accidentés est mort. Elle conduisait en état d’ivresse. Aujourd’hui elle poursuit sa peine en France, à la prison de Fresnes. Voici ce qu’elle m’écrit : « Chaque jour, mon but est de trouver un quelque chose de bien, de beau à contempler, à humer, à entendre, à lire… En Pologne mes compagnes me le disaient aussi souvent : Toi tu es toujours focus sur les bons moments que tu vas trouver ». Là-bas, je collectionnais les plumes, les herbes qui tombaient des barreaux ou alors dans les cours de promenade bétonnées (car au-dessus, était étendu un grillage où les pigeons se posaient). Depuis la Pologne, je colle mes trouvailles de plumes, herbes, fleurs. C’est comme des cadeaux du Ciel, des Signes d’En-Haut qui ont réussi à passer à travers les murs surmontés de barbelés, les grillages, les miradors, les couloirs longs à n’en plus finir, les portes blindées. Cette collection me maintient en vie.
On peut se donner le droit d’être dans la joie, on peut corriger son filtre négatif, mais en plus, si on sait reconnaitre les signes du Seigneur qui vient sans cesse dans nos vies, comme dit Néhémie (8,10) « sa Joie sera notre forteresse ». Amen !
24 décembre 2023. 4° avent B Saint-Antoine et Val-Vert
Frères et sœurs, En quoi le Oui de la Vierge Marie ce jour-là est-il exceptionnel, inouï, insurpassable ? On n’aura jamais fini de contempler ce OUI.
Prenons l’angle qui consiste à le comparer avec le Non d’Adam et Eve.
Le péché originel qui se transmet de génération en génération c’est entre autre une idée faussée de Dieu à cause du pervers serpent qui nous fait tout déformer. Notre Dieu serait quelqu’un qui nous trompe. Le serpent vient tourner le don en « est-ce que ce n’est pas quelque chose de pervers ? ». C’est en cela que la Vierge Marie est extraordinaire. Quand l’ange Gabriel s’approche, elle n’est pas dans cette peur qu’il pourrait la tromper. Par le passé avant elle, même des personnes qui sont devenues des grands prophètes par la suite, ont d’abord réagi en disant : « Je ne suis pas digne, je suis trop jeune ». Moïse dit : « Je ne sais pas parler ». Ils disent tout de suite « je ne suis pas à la hauteur ». La Vierge Marie, dans la manière dont elle écoute, n’a pas peur de Dieu. Elle sait d’emblée que Dieu est celui qui sauve, qu’il est le Dieu de la Vie. Nous, nous avons tellement de mal à croire en la bénédiction originelle. La Vierge Marie ne dit pas : « Je ne suis pas digne, qu’est-ce qu’il va me tomber dessus ? ». A cause du péché originel, le Don gratuit nous est insupportable. « Il faut que je sois digne ; il faut que j’en sois capable ; ou bien il faut que je paie ». Le péché originel c’est profondément ne pas entendre ce Don premier qui est à l’origine de notre vie. On a du mal à entendre que c’est de la grâce pure. Il nous faut reconnaitre en nous la peur de ce Dieu. C’est vrai qu’on n’est pas digne de la création de l’univers. On n’est pas digne de notre propre création. Alors n’essayons pas d’être dignes. Cette vie est surabondante ; alors ce n’est pas la peine d’essayer d’être à la hauteur.
En éducation, il est bien supérieur de savoir faire participer quelqu’un, même faiblement, même maladroitement à une œuvre, que de la faire soi-même tout seul. Eh bien, Dieu se montre grand en faisant participer l’une d’entre nous à son œuvre de Salut, et du coup chacun d’entre nous.
La Vierge Marie ne se laisse pas aller à l’étourdissement (Oh, chic, un ange me parle, quand je vais raconter ça aux copines !) Elle est complètement dans la conversation. Elle pose une question. Et cette question peut être comprise de trois façons. « Je suis vierge, c’est-à-dire je suis toute consacrée au Seigneur corps et âme ; j’ai fait vœu de virginité. » Ou bien : « pour concevoir un enfant, il faut être deux, or je suis toute seule ». Ou encore « je ne connais pas d’homme capable d’engendrer un tel enfant, je ne connais pas un tel homme ». Et l’ange répond à son interrogation : « L’Esprit Saint viendra sur toi. » En ce temps où nos projections pour l’avenir, qu’elles soient personnelles, d’Eglise ou de société sont moins claires que celles d’une jeune fiancée, laissons entrer dans nos réflexions la présence de l’Esprit, sa présence dans le monde, dans nos vies, dans l’Eglise. L’avent nous apprend à nous ouvrir à l’inédit. Comme Marie, osons dire : que tout se passe selon ta parole. La Vierge Marie est le paratonnerre de l’Esprit-Saint. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, le paratonnerre ne chasse pas la foudre. La Sainte Vierge attire le Saint Esprit et le conduit là où il faut. Confions-nous à son intercession maternelle. Amen !
Noël 2023 (Ceyssac et Guitard)
Frères et sœurs,
Dans la petite grotte de Bethléem, nous avons déjà l’Eglise catholique. Catholique veut dire universel. Le diminutif « catho » est aujourd’hui presqu’une insulte ! Il signifie en gros coincé, étroit, ringard… L’Église est catholique parce qu’elle annonce la totalité de la foi parce qu’elle porte en elle et administre la plénitude des moyens de salut, parce qu’elle embrasse l’univers entier dans son ambition et est envoyée à tous les peuples. Catholique, ce mot est non seulement un titre, mais un programme. Bien sûr, l’Eglise demeure le petit troupeau. Elle est pourtant catholique, car la catholicité n’est pas une question quantitative.Quand deux ou trois sont réunis au nom de Jésus, le Seigneur est au milieu d’eux (Mt 18,20). L’Église universelle sera encore mieux figurée, lorsque les trois rois mages, issus de la diversité, apporteront un peu de mixité sociale dans la crèche juive, blanche et pauvre. Ils représenteront toute l’humanité rassemblée autour du Sauveur. Dans la grotte de la Nativité, les étoffes précieuses côtoient la paille des animaux, l’opulence la pauvreté, le ciel la terre, les païens les juifs, et les hommes leur Dieu. Georges Bernanos a écrit : « L’Eglise est une maison de famille, une maison paternelle, et il y a toujours du désordre dans ces maisons-là. Les chaises ont parfois un pied de moins, les tables sont tachées d’encre et des pots de confiture se vident tout seuls dans les armoires… La Maison de Dieu est une maison d’hommes et non de surhommes. Les chrétiens ne sont pas des surhommes. Les saints pas davantage, ou moins encore, puisqu’ils sont les plus humains des humains. »
Alors voici quelques témoignages tout simples de ce que Jésus réalise à travers elle.
Un prêtre raconte qu’un jour, un monsieur jeune vient lui demander : Moi-même je ne suis pas baptisé mais je voudrais quand même me marier à l’église. Mais je voudrais en faire la surprise à ma femme. Quand on sortira de la mairie, j’aimerais lui dire : « Chérie, on ne va pas tout droit à la salle du vin d’honneur mais on va à gauche direction l’église » … ! Evidemment c’était impossible, mais le prêtre a su écouter le cœur de ce jeune et lui parler. Aujourd’hui, il se prépare au baptême.
Le Père Roger a un vrai charisme de présence auprès des pauvres. Il est aussi aumônier des manouches. Un jour on lui apprend qu’une famille vient de perdre un bébé d’un mois. Les bruits courent qu’ils l’ont étouffé ; en fait il s’agit de la mort subite du nourrisson. Le Père Roger les écoute longuement avant que ne leur vienne l’idée : « Si vous y êtes, alors nous pourrions faire quelque chose à l’église ». Le jour dit, il a préparé le cierge pascal et un petit cierge de baptême. Il a aussi préparé des lumignons. Il pensait que trois ou quatre suffiraient mais il n’a pas eu assez des 60 qu’il avait apportés. Tous voulaient faire le chemin de lumière. Au cimetière la maman avait apporté une petite couverture pour envelopper le cercueil ; elle avait peur que son enfant ait froid.
Une maman de trois enfants qui ont déjà entre 21 et 28 ans raconte que son plus jeune fils a perdu son meilleur copain qui était souvent chez eux dans un grave accident de voiture. Toute la bande a abandonné toute pratique. Mais ils se réunissent à la maison et demandent à la maman ce qu’ils peuvent faire pour la célébration à l’église de Sanssac qui rassemblera plus de 200 jeunes. Depuis, ils signalent régulièrement qu’ils sont allés faire une visite à leur copain au cimetière. Cette maman leur a permis de faire l’expérience de l’espérance chrétienne.
Et petite anecdote qui en dit long sur le fait que les cathos œuvrent gratuitement dans tous les sens du mot. Dans les fioretti des franciscains du Bronx, il y a celui-ci particulièrement souriant. La communauté avait un poêle qui ne fonctionnait plus. Les frères un peu bricoleurs avaient essayé plusieurs fois de le réparer mais sans succès. Et ils n’avaient pas l’argent pour solliciter un dépanneur professionnel. Finalement, ils décident de demander au Seigneur d’agir lui-même sur ce chauffage qui améliorerait quand même un peu le confort. Ils prient autant qu’ils peuvent avec ferveur et confiance. La nuit suivante, on est venu le leur voler…. Le Seigneur a parfois une drôle de façon de répondre aux prières !
L’Eglise catholique c’est la grotte de Bethléem qui contient le trésor précieux de Jésus. Nous l’avons reçu gratuitement, nous le donnons gratuitement. Mais y a-t-il une joie plus profonde que celle de transmettre Jésus ?
31 décembre 2023 Sainte Famille
Frères et sœurs, dans l’évangile de cette fête de la sainte Famille, il y a comme un feu d’artifice de titres de Jésus. Nous pouvons les inventorier et voir ce qu’ils nous disent de la famille.
Jésus est « la purification ». C’est étonnant de parler de purification pour une maman qui vient de donner naissance à un bébé. Alors il faut faire le rapprochement avec ce qui se passe à la fin de chaque messe. L aussi on parle de purification du calice. Or il vient de contenir le Précieux Sang de Jésus. Cela nous suggère qu’une maman comme le Calice de la messe vient de faire une Œuvre Divine. Jésus purifie au sens où il reverse dans l’ordinaire ce qui vient d’être extraordinaire. Une invitation de plus à l’émerveillement.
Jésus est « le premier-né ». Ce terme annonce déjà ce qu’il se passera à la croix. Nous recevrons la Vierge Marie pour maman. Jésus est notre frère aîné. Nous recevons la même bénédiction, les mêmes grâces que lui ; en premier lieu, nous avons droit à la même maman. Une invitation à prendre Marie et Joseph dans nos familles.
Jésus est le « consacré au Seigneur ». A l’instar de Jésus, tout baptisé est mis à part. Consacré ou sacrifié, c’est le même mot. Rendu sacré. Un ami prêtre plaisante : quand il est passager dans une voiture et que le conducteur lui demande : « Tu n’as pas peur ? » il répond : « Non, de toute façon, j’ai fait le sacrifice de ma vie ». C’est vrai que quand notre vie est donnée au Seigneur, cela enlève beaucoup d’inquiétudes inutiles ! Une invitation à nous en remettre de plus en plus en lui jusqu’à notre mort où nous pourrons basculer définitivement dans Ses Mains.
Jésus est « le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur » : Jésus est non seulement Consacré, mais Le Sacrifice lui-même. Le sacrifice catholique ce n’est pas le sacrifice des hommes préhistoriques : donnant-donnant. Le sacrifice catholique consiste à accueillir Jésus, à ratifier le Don inouï qu’il me fait de sa Personne, à se donner à Jésus, et à communier à Jésus. En Lui, nous avons accès au Père. Avec lui, nous pouvons prétendre entrer dans la Gloire de Dieu. Par lui, Dieu est à notre portée. Pour cela il nous faut comprendre qu’il ne s’intéresse pas tellement à nos réussites, nos exploits, nos performances. Tout cela il le laisse aux Zélites mondiales qui sont liées au diable. Jésus, s’intéresse d’abord à nos échecs. Qu’en faisons-nous ? S’en désoler peut être une forme d’orgueil (mon image de marque est écornée ; mon Môa tombe de son piedestal ). Les donner au Seigneur évite de se prendre au sérieux et contribue au Royaume des Cieux. Une invitation à envisager nos péchés sous l’angle de la miséricorde.
Jésus est « la Consolation d’Israël ». Rien que le fait de prononcer son prénom apaise, rassure, réconforte, redonne espérance.
Jésus est « le Christ, le Messie du Seigneur ». Pas besoin d’en attendre un autre.
Jésus est « l’enfant ». Etymologiquement « enfant » signifie le « sans parole ». Il ne parle pas mais il change tout. Pourquoi notre société a-t-elle si peur des enfants (l’avortement dans la constitution, pas d’enfant pour sauver la planète alors qu’un volcan crache en un jour l’équivalent carbone d’une année… !)
Jésus est « le Maître souverain ». Quel réconfort de le savoir. Le frère Paul-Adrien termine toujours ses vidéos par « l’amour vaincra ». Il sera plus juste de dire « Jésus vaincra ». Bien sûr Jésus est l’Amour. Mais l’amour est un mot frelaté qui peut être mal compris.
Jésus est « le salut ». Parce qu’il nous libère de nos péchés et parce qu’il nous fait faire ; il nous élève au-dessus de nous-même.
Jésus est la « lumière qui se révèle aux nations ». Il n’est pas un chemin parmi d’autres. Il est l’Unique Chemin. On trouve le bon berger, comme on trouve la bonne clef, le bon médecin, la bonne solution.
Jésus est la « gloire à ton peuple Israël ». La fierté d’Israël, le fleuron. Ah si Benjamin Netanyahou pouvait faire comme Aaron Lustiger, Ratisbonne, Véronique Lévy, Marcel Dassault, Stéphane Bern, Henri Bergson, Simone Weil, Gad Elmaleh !!
Jésus est « le signe de contradiction », une pierre d’achoppement, une pierre qui fait tomber. Dans la mythologie grecque, on arrivait devant le sphinx qui vous posait une question en vous disant : « Réponds ou bien meurs ». Qui est Jésus pour moi ?
Jésus est « la délivrance de Jérusalem ». Délivrance, libération. Parce que nous avons l’art de nous empêtrer dans des liens néfastes, nocifs comme les mouches dans des toiles d’araignée, il adonné à son Eglise une incroyable panoplie de moyens pour nous sortir de la toile.
Jésus est « rempli de sagesse ». C’est le meilleur des psys et des coachs.
La grâce de Dieu est sur lui.