3° dimanche de Pâques, Malpas et Solignac 4 mai 2025

Frères et sœurs, il y a un animal dont le nom revient six fois dans cette page d’évangile. C’est … le poisson. Vous savez que, avant la croix, le poisson – c’est tellement facile à dessiner – a été le signe de reconnaissance des chrétiens. Encore aujourd’hui : quand vous en voyez un à l’arrière d’une voiture, vous savez que le conducteur est chrétien. En fait, c’est un dessin codé :  en grec,  « POISSON »  cela se dit « ICHTUS ». Chaque lettre est le début d’un mot et l’ensemble constitue une phrase qui signifie : JESUS CHRIST DIEU-LE-FILS SAUVEUR. En cachant astucieusement dans les lettres du mot Ichthus une vraie profession de foi en Jésus, les premiers chrétiens de Rome pouvaient placer le poisson sur leurs maisons, sur leurs tombeaux, pour indiquer aux « initiés » que dans telle habitation vivaient des chrétiens, que tel tombeau était chrétien. Voici ce qu’écrit un pèlerin clandestin pour raconter à sa famille ce qu’il voit à Rome et évite que les païens qui viendraient à lire sa lettre ne comprennent : « Ici, partout j’ai vu une fiancée, partout  j’ai vu des frères, partout la fiancée m’a servi en nourriture un poisson de source, très grand, très pur. » Cette phrase signifiait, une fois décodée : « Ici, partout j’ai vu la communauté chrétienne, partout j’ai vu des chrétiens, partout l’Eglise célébrait la messe  au cours de laquelle j’ai reçu le Corps du Christ, lui qui est Dieu et saint. » On rusait pour aller donner l’Eucharistie aux martyrs qui allaient mourir, en disant aux gardiens de la prison : « Je leur apporte un poisson ».

Le poisson représente le grand désir de Jésus. Pourquoi croyez-vous qu’il ait préparé un peuple pendant 2000 ans, pourquoi croyez vous qu’il soit né parmi nous, qu’il soit mort sur une croix, qu’il soit ressuscité ? C’est pour se donner en nourriture à chacun. Comme de l’homéopathie et mieux que l’homéopathie, comme une perfusion et mieux qu’une perfusion, comme une saine nourriture et mieux qu’un aliment énergétique puisque c’est une personne qui se donne, Dieu le Fils qui nous sauve de l’enfermement sur nous-mêmes, du découragement, de l’égoïsme, du mensonge,

Ce fait  est authentique même s’il est surprenant. Il s’agit au départ d’un couple  dont  l’épouse, Irène est catholique pratiquante et le mari, Michel est incroyant et indifférent. Pendant près de vingt ans, Irène tente de décider Michel à l’accompagner à la messe et à s’intéresser à la vie paroissiale, mais ironisant sur la foi de son épouse et sa pratique, il refuse de faire le moindre pas. S’en doute-t-elle ? Michel lui cache beaucoup de choses et a assez souvent des aventures extraconjugales. Cependant, à la faveur d’un évènement douloureux et d’une rencontre providentielle, Michel se convertit. Il demande alors à un prêtre de l’entendre dans le sacrement de réconciliation. Il se confesse longuement, sincèrement, très en détail et reçoit l’absolution. Pour lui, c’est une vraie libération. Cependant, il a tellement honte de toute sa vie passée qu’il lui est impossible d’aller communier. Malgré l’insistance du prêtre qui a suivi de près sa conversion, Michel prend part régulièrement à l’eucharistie sans recevoir la communion, car il se trouve trop indigne. Mais n’oublions pas que le Seigneur a plus d’un tour dans son sac. Un jour, Michel et Irène participent à une célébration de mariage dans une chapelle perdue dans la campagne. Comme on n’y célèbre la messe que deux ou trois fois par an, le tabernacle reste vide toute l’année. A la fin de la messe, le prêtre se rend compte qu’il a consacré beaucoup trop d’hosties ; après la communion, il se retrouve avec une cinquantaine d’hosties qu’il ne peut ni laisser dans le tabernacle, ni emporter. Par ailleurs, il ne peut pas les « consommer » seul. Que faire ? Etant arrivés en retard, Michel et Irène n’ont trouvé place dans cette chapelle de campagne très jolie mais toute petite, que dans le chœur près d’un pilier. Ce prêtre ne connaît pas Michel mais les yeux de Michel croisent « par hasard » ceux du prêtre un peu désemparé.  Celui-ci lui fait un signe discret pour le faire venir près de lui. Michel, par deux fois, lui demande par signe aussi, si c’est  bien à lui qu’il s’adresse. Le prêtre confirme de la tête… Michel qui a bon cœur se sent obligé de s’approcher de l’autel… Et le voilà qui consomme, pour sa première communion, environ vingt cinq hosties. Le Seigneur ne manque pas d’humour…

Comment ne pas être bouleversé en pensant que Dieu si grand vient s’asseoir chaque jour à la table des pécheurs ? Ce Mystère est si grand que le Seigneur demande à certains parmi nous, par son Eglise, de ne pas communier à cause de leur situation de vie. Ils viennent recevoir la bénédiction du prêtre mais il ne prennent pas l’hostie. Je les remercie. Pourquoi ? Ils savent que l’on peut communier sans recevoir l’hostie comme on peut hélas, recevoir l’hostie sans communier. Ils savent qu’ils peuvent « communier par les yeux ». Ils savent qu’ils nous aident, nous qui pouvons communier, à ne pas communier machinalement. La clef est dans la fin de l’évangile de ce dimanche  : « Quand tu étais jeune, tu mettais ta ceinture toi-même pour aller là où tu voulais… maintenant, un autre te mettra la ceinture et tu iras là où tu ne voudrais pas aller. » La foi c’est quitter sa volonté propre pour s’en remettre humblement à Jésus. C’est comme cela que nous faisons des pêches miraculeuses. Je vous suggère une idée pour savourer la qualité de ce Poisson et sa capacité à nous sauver : quand vous entrez dans l’église, ne passez devant le tabernacle où il est conservé comme on passe devant son frigidaire. Mais adorez-le un instant. Quand vous le recevrez en communion trois quarts d’heure plus tard, vous entrerez mieux dans son Mystère. Amen !

11 mai 2025 Dimanche du Bon Berger et de prière pour les vocations

Jean (Jn 10, 27-30) : «En ce temps-là, Jésus déclara : « Mes brebis écoutent ma voix ; moi, je les connais, et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle : jamais elles ne périront, et personne ne les arrachera de ma main. Mon Père, qui me les a données, est plus grand que tout, et personne ne peut les arracher de la main du Père. Le Père et moi, nous sommes UN. »

L’évangile de ce 4° dimanche de Pâques est très court. On peut le commenter ligne par ligne.

« Mes » : cet adjectif possessif est tellement affectueux ! Tout baptisé peut dire : « Je suis « de Jésus » !

« Brebis » Ce n’est peut-être pas la première comparaison que nous aurions choisie mais c’est pourtant tellement beau. Le Père curé de mon enfance était nommé dans des paroisses où il fallait construire des « maisons des œuvres » parce qu’il savait faire le bûcheron, le maçon ; c’était un travailleur infatigable. Mais il devait aussi solliciter ces ouailles pour payer les factures. Il disait avec malice : « Quand je paraîtrai devant le Seigneur, il me dira : « Alors, Jean, as-tu été un bon berger pour mes brebis ? » Je lui répondrai : « j’ai essayé, Seigneur ; en tout cas, il y a une chose qui est sûre, c’est que tes brebis je les ai toujours tondues de près, de très très près. » … !   Etre comparé à une brebis cela peut faire niais, grégaire, mais y a-t-il meilleur symbole de tendresse, de délicatesse, de non-violence, de douceur, de docilité ?

« écoutent » : dans l’écoute il y a plus qu’entendre. « Je lui avais conseillé de prendre telle route mais il ne m’a pas écouté. » Ecouter, c’est donner sa confiance. Ecoute : c’est le premier mot de la Règle de saint Benoît qui se termine par « et tu parviendras ».

« Ma voix » : une voix c’est très caractéristique. Quand vous décrochez votre téléphone, dès le premier « allo », vous savez qui est au bout du fil. La voix de Jésus, il arrive un jour où vous la reconnaissez entre mille.

« Je les connais » : ça c’est le christianisme. Il y a un moment dans notre parcours religieux où soudain les idées deviennent une personne, où on a la certitude que notre nom est inscrit dans les cieux, où l’on sait que Le Seigneur sait exactement le nombre de nos cheveux. Sainte Thérèse : « Et moi, j’étais avec Dieu comme une petite fille sur les genoux de son papa, et qui se croit tout permis. » Ca c’est la religion chrétienne. Un garçon a vécu trois grands traumatismes dans son enfance. Chacun aurait pu bouziller sa vie à lui tout seul. Mais arrivé en cinquième, en internat, une nuit, Jésus l’a visité et lui a dit : « J’ai besoin que tu sois mon ami. » Pas « je t’aime ». Pas « je suis ton ami » mais « j’ai besoin que tu sois mon ami ». Il a pris très au sérieux cette Parole qui l’a bouleversé. Cette Parole est devenue sa force. Aujourd’hui il est un époux comblé, un papa très heureux, chef d’entreprise d’une PME de 120 salariés, et à la tête d’une association qui s’occupe de 400 jeunes des banlieues, toujours aussi proche de Jésus.

« Et elles me suivent » : Jésus est devant nous. Nous sommes dans son sillage. Ça nous rassure et c’est notre fierté.

« Je leur donne la vie éternelle ». La vie c’est un cadeau merveilleux. Il nous a été offert absolument gratuitement, et pas pour un temps limité mais pour l’éternité. C’est somptueux d’exister ! Ce n’est pas quelqu’un d’autre ! C’est bien moi. On comprend la prière de sainte Claire d’Assise toute simple : « Merci mon Dieu de m’avoir créée ! » Le corps se déglingue mais l’âme ! L’âme c’est extraordinaire ! J’ai le sentiment qu’elle rajeunit de jour en jour ! Il ne faut pas que j ’aille trop vite ; on dirait que je tombe en enfance ! Au Ciel, l’ennui on ne saura pas ce que c’est. La tristesse, de quoi tu parles ? La déception ? c’est quoi ce mot ? L’échec, c’est quoi ? Il faut se placer dans la perspective décrite dans le Livre de l’apocalypse (2° lecture) : « ils n’auront plus faim, ils n’auront plus soif. Ni le soleil ni la chaleur ne les accableront puisque l’agneau sera leur berger pour les conduire aux sources des eaux de la vie. Et Dieu essuiera toutes larmes de leurs yeux. »

« Jamais elles ne périront. Personne ne les arrachera de ma main. » Nos contemporains sont un peu comme quelqu’un qui se réveillerait sur un bateau au beau milieu de l’océan. D’où je viens ? Je ne sais pas.  Où je vais ? Je ne sais pas. Qui m’a mis dans ce bateau ? Je ne sais pas. Pour quoi faire ? Je ne sais pas. Edmond Rostand : « Nous venons de rien. Nous allons vers rien. Nous ne sommes rien. » Ce n’est pas très grisant. Eh bien l’évangile nous répond : quelles que soient les circonstances dans lesquelles il a été conçu, chacun existe d’abord parce qu’il a été désiré par Jésus. 

« Mon Père est plus grand que tout ». 

« Personne ne peut les arracher de la main du Père. Le Père et moi nous sommes un. » On ne peut rien arracher au Père, arracher au sens d’obtenir par force ou par négociation. On ne peut que recevoir. On ne peut que célébrer son Nom. On ne peut que dire « Amen » « je valide ». Voilà pourquoi Jésus a institué le sacerdoce, le sacrement qui fait les prêtres. Pour perpétuer partout et dans toutes les générations la joie éternelle de l’unité du Père et du Fils, la joie de cette communion éternelle mise à notre portée par le baptême et la confirmation et entretenue par la messe. Le prêtre est l’homme de la communion. Quand il confesse, il chasse l’esprit de division. Quand il célèbre la messe, il donne Jésus qui unifie chacun et qui fait l’unité (comme l’axe de la roue de vélo rapproche les rayons les uns des autres). 

Les prêtres sont des humains. J’aurais été Dieu, j’aurais choisi des archanges pour transmettre la joie de l’évangile. A saint Jean-Marie Vianney futur saint curé d’Ars, menacé d’être exclus du séminaire, pour insuffisance intellectuelle. « Vous n’êtes qu’un âne ». Réponse de saint Jean-Marie : « Avec une mâchoire d’âne, le Seigneur a mis en déroute 10000 philistins. Que ne fera-t-il pas avec un âne tout entier ? »

Brebis ou âne, que le Seigneur nous garde à notre juste place. Amen !

5° dimanche de Pâques année C 18 mai 2025

Frères et sœurs, La première lecture nous dépeint comment se passait la toute première annonce de l’évangile. Les apôtres allaient dans les synagogues du pourtour de la Méditerranée. Ils parlaient d’abord à leurs frères de religion juive pour leur expliquer que le Messie venait d’arriver et qu’il accomplissait les Ecritures au-delà de toute espérance puisqu’il était Dieu en personne. Ils baptisaient et puis ils ordonnaient un « ancien » pour conduire la petite communauté. Quand ils ont réalisé que l’évangile était aussi pour les païens, ils se sont mis à parler aussi à ceux qui ne connaissaient ni Abraham ni Moïse ni rien du tout de la Bible.

Mais au fait quel est cet évangile qu’ils sont si pressés d’annoncer ? La deuxième lecture nous le dit. Il s’agit de l’Alliance, du « mariage » enfin réussi entre Dieu et l’humanité en Jésus. En Jésus le mariage est parfait. Il a tenu bon contre les assauts du mal. Le Mal est vaincu. « Maintenant le Fils de l’Homme est glorifié et Dieu est glorifié en Lui ». La Bonne Nouvelle c’est que l’Eglise est dépositaire de cette victoire. Nous pouvons être associés à cette Communion divine mise à notre portée.

Pourquoi le commandement « Aimez-vous les uns les autres » est-il nouveau ? Parce que dès qu’il est accompli, il rend présent Jésus. S’efforcer d’accomplir ce « commandement » c’est mettre Jésus aux commandes. Jésus a fait don de sa personne : « Ceci est mon corps et je vous le donne. » Il se donna sans condition. C’est le don mutuel de soi. Cela peut prendre la forme de l’amitié, de l’engagement, et même, en fin de compte du mariage quand on dit à l’autre : « je te reçois comme époux(se) et me donne à toi maintenant et pour toujours ».

. Jésus n’a pas dit : « Si les conditions vous le permettent aimez-vous ». Notre amour doit être inconditionnel. Le meilleur modèle c’est la maman. Son enfant peut lui en faire voir de toutes les couleurs : fugues, prison, drogue, violence,… elle continue de l’aimer. Un dessin de Sempé : un monsieur s’adresse à Dieu au sommet d’une montagne : « Seigneur, j’ai pardonné à tout le monde, mais j’ai des noms ». Je t’aime si tu es bien sage, si tu fais mes quatre volontés : cela ne marche pas. Je t’aime. Point. Je le dis aux fiancés qui se préparent au mariage parce que, dans une vie de couple, peuvent se glisser du chantage, de la manipulation ; il ne faut pas .

. Jésus n’a pas dit : « Aimez-vous, vous verrez : ça paiera. » Petite confidence : j’ai été vicaire d’un curé pendant six ans, le Père Charles. Un jour, il me racontait qu’il avait dû se montrer sévère envers quelqu’un. J’ai voulu faire de l’humour en lui disant : « A défaut de se faire aimer, il faut savoir se faire craindre ». Il n’a entendu que la première partie et il m’a remonté les bretelles : « Si tu cherches à te faire aimer, tu es fichu. L’amour viendra ou ne viendra pas. Il ne vient que par surcroit ». Nous n’aimons pas pour avoir du retour. L’amour est gratuit.

. Jésus n’a pas dit : « Aimez-vous les uns les uns les autres les autres (un prédicateur disait : « quand on ne s’aime que les uns les uns, on devient zinzin ».. !) Notre amour doit être universel. Comment faire ? Une distinction très simple peut nous y aider : la différence entre respect et tolérance. Tout être humain quoi qu’il ait fait est infiniment respectable. Mais il y a des opinions, des idées, des comportements qui sont intolérables. Je t’aime mon frère mais je te dis que tu nous mènes à la catastrophe. C’est aimer l’autre que de lui dire que ses idées, ses lois, sont intolérables.

. Jésus n’a pas dit : « Si vous le sentez, aimez-vous ». L’amour ne s’enracine pas dans le ressenti mais dans la volonté. J’aime parce que j’ai promis. Aimer c’est du sentiment mais c’est surtout un serment.

Le cardinal Joseph Ratzinger, la veille de l’entrée en conclave qui devait l’élire Pape disait : « Tous les hommes veulent laisser une trace qui demeure. Mais qu’est-ce qui demeure? Pas l’argent. Même les constructions ne demeurent pas; les livres non plus. Après un certain temps, plus ou moins long, toutes ces choses disparaissent. L’unique chose qui reste pour l’éternité est l’âme humaine, l’homme créé par Dieu pour l’éternité. Le fruit qui reste est donc ce que nous avons semé dans les âmes humaines – l’amour, la connaissance; le geste capable de toucher le cœur, la parole qui ouvre l’âme à la joie du Seigneur. Alors, allons et prions le Seigneur, pour qu’il nous aide à porter du fruit, un fruit qui demeure. Ce n’est qu’ainsi que la terre peut être transformée d’une vallée de larmes en un jardin de Dieu.»

Mgr Brincard interpellait un jour des jeunes en leur posant la question : « Est-ce que tu es la source de l’amour ? Si tu me dis « Oui », je te demande : pourquoi n’aimes-tu pas tout le temps ? Une fontaine ne coule pas par intermittence. Si tu me dis non, alors qui est la Source de l’amour ? D’où vient-il ? ».  Il vient de Jésus. Voilà la bonne nouvelle. C’est pourquoi nous venons faire le plein régulièrement à la messe ;  nous pensons que les autres ont droit à plus qu’à notre bonté naturelle. Ils ont droit à l’amour même de Dieu qui peut couler à travers nous « à l’insu de notre plein gré ».

La Vierge Marie a parfaitement réussi ce commandement. Son oui, est le premier oui de l’Eglise en même temps que la première manifestation visible du Oui éternel du Fils au Père. Elle est en premier la Demeure de Dieu parmi les hommes. Elle peut nous aider dans cet apprentissage de l’Amir qui demeure jusque dans la vie éternelle ! Amen !

25 mai 2025 6°dimanche de Pâques année C Recevons le Seigneur Esprit-Saint sans tarder !

Frères et sœurs, il y a dans cette page d’évangile un passage que nous connaissons vraiment par cœur puisque nous l’entendons chaque jour à la messe juste après le Notre Père : Seigneur Jésus tu nous as dit : « je vous laisse la paix, je vous donne la paix ». Pétrarque raconte un dialogue avec un fou. Celui-ci voyant des soldats en marche, demande au poète : – Où vont-ils ? – A la guerre ! – Mais – observe le fou – cette guerre devra bien se terminer un jour par la paix, oui ou non ? – Certes ! réplique le poète. – Mais alors, pourquoi ne pas faire tout de suite la paix, avant de commencer la guerre ? – Moi – conclut mélancoliquement Pétrarque – je suis du même avis que ce fou ! Puissent tous les hommes avoir cette folie !

Mais Jésus semble faire une répétition. Mais est-ce une répétition ? « Je vous laisse la paix », cela signifie je vous charge de transmettre ma paix. Je vous confie le soin de diffuser la paix du Ciel que j’ai implantée sur la terre. Mais c’est une mission impossible alors cette paix, je vous la donne en me donnant en communion. Un grand jeune nous avait dit un jour : « je continue d’aller à la messe chaque dimanche parce que depuis tout petit j’ai fait cette expérience : à la maison pendant la semaine, il y avait des tensions, des fâcheries, mais après la messe du dimanche nous passions des heures de grande paix. »

Jésus nous parle du Saint-Esprit ! Visuellement on se représente soit un oiseau (une colombe), soit un gaz. Le Seigneur Esprit-Saint c’est une Personne qui va nous faire passer du « monde » au Ciel. Qu’est que le « monde » ? C’est un état. L’eau a plusieurs états : solide liquide gazeux. Chacun de ces états à des lois. De même il y a trois lois fondamentales du « monde » : l’individualisme, le consumérisme et le relativisme.

L’individualisme fait que je me considère comme le centre du monde. Tout doit tourner autour de moi même au niveau spirituel : les sacrements c’est « pour moi », la prière c’est « pour moi ».

La deuxième loi : plutôt que de société de consommation, il faudrait parler de société de surproduction ; on doit déclencher l’envie de la consommation, on crée le besoin. Mais du coup, toute ma vie peut être sous la loi du besoin : je consomme ma famille, mon travail, ma foi. Appeler mes parents ? Je n’en ai pas besoin. Me confesser ? je n’en ai pas besoin. Et une fois que j’ai consommé, je jette. Donc je ne m’engage pas.  Je rencontre plein de personnes, je vais à plein de soirées, j’organise plein de fêtes. Je consomme.

Troisième loi : le relativisme. Il y a en nous un traitre qui dit : c’est moi qui décide de ce qui est vrai et de ce qui est faux, de ce qui est mal et de ce qui est bien. Ca me plait, c’est vrai. Ca ne me plait pas , c’est que c’est faux. Quelqu’un qui est profondément colérique, va tout le temps vous dire qu’il y a des moments il faut savoir se mettre en colère. Jésus dit « Quiconque se met en colère contre son frère est passible de la géhenne de feu » ; « Oui, mais il faut replacer dans le contexte ».

Le remède ça va être de vivre de l’Esprit. Le Seigneur Esprit-Saint c’est l’ultime cadeau total de Dieu. L’Esprit c’est le ruah, c’est à dire un mot hébreu qui exprime déjà ce que c’est : le souffle. Une Personne de la Trinité est le Souffle de Dieu. Etonnant ! Votre Souffle, vous ne le possédez pas. Il vous traverse, il vous dépasse complétement. Il résiste à toutes les lois du monde, parce qu’il n’est pas centré sur nous, il n’est pas consommable et on ne peut pas maitriser sa Présence. Le Seigneur Esprit-Saint c’est quelqu’un qui dit « coucou, je viens habiter chez toi ». Et vous pouvez être sûr qu’il ne se contentera pas d’être un locataire plan-plan. Il va mettre du changement, il va même peut-être faire sauter le mur porteur auquel je tenais tant. Il va peut-être percer des ouvertures. Si je l’invite il considère que ma maison c’est sa maison. Ou pour le dire avec un jeu de mot :il n’est pas un simple résident. Il veut être un vrai président. Il ne veut pas que résider  il veut présider à ma destinée.

Que faire pour le recevoir ? Comme un petit bébé. Nous sommes des enfants de six mois qui avons la couche pleine. Aucun enfant de six mois ne s’est levé un jour en disant : « Allez, à partir de maintenant c’est moi qui fais ». Il en est incapable. Le monde est incapable de se changer tout seul. Jésus vient pour le changer. Aucun papa, quand l’enfant lui saute dans les bras ne dit : « oh la la ! la couche est pleine ; je te laisse par terre ».  Et le laisse tomber.  Non. Le papa dit: « o lala la couche est pleine, on va la changer ». 

Le vrai effort c’est d’accepter d’être guéri. C’est de dire « Oh la la j’ai la couche pleine » !

Il y en a une qui s’y connait en couches pleines, c’est la Vierge Marie puisqu’elle a servi Dieu y compris dans ces moments-là quand Jésus était tout petit. Qu’elle nous obtienne l’humilité pour que le Seigneur Esprit-Saint puisse nous sortir de l’individualisme, de l’esprit de consommation et du relativisme. Amen !

Ascension 29 mai 2025

Frères et soeurs, est-ce qu’il est important de savoir si le Ciel existe ou non ? On a accusé les chrétiens d’avoir inventé l’au-delà pour faire supporter aux hommes leurs malheurs. Le Ciel ne serait qu’une espèce de rêve pour s’évader, une espèce d’opium pour avoir moins mal.
On peut faire remarquer qu’on n’a pas attendu les chrétiens pour croire au Ciel. Pour les paléontologues — qui étudient les fossiles pour reconstituer l’évolution de l’homme — le critère pour dire qu’il s’agit d’un homo sapiens et non d’un animal, c’est que cet individu a reçu une sépulture. Les animaux n’enterrent pas leurs morts.

Jésus nous éclaire par une toute petite image, très simple, à la portée de tous, mais qui nous ouvre à l’espérance de cette fête de l’Ascension. Il nous suggère de penser à la graine semée
Des égyptologues ont raconté comment ils étaient parvenus à la chambre funéraire d’un pharaon à travers le labyrinthe des galeries. Quand enfin ils ont découvert la momie vieille de 4000 ans, ils ont eu la surprise de trouver autour d’elle des amphores qui avaient contenu de la nourriture : signe que cette civilisation croyait en une survie de la personne. Deuxième grande surprise : une de ces amphores contenait des grains de blé, parfaitement conservés dans des conditions atmosphériques idéales et à l’abri de tous les animaux. Curieux, ils ont semé ces grains vieux de 4000 ans ! Ils ont germé et poussé jusqu’à la moisson. J’avais raconté cette histoire pour une homélie d’enterrement à Yssingeaux un mercredi après midi. Le lendemain, jeudi, jour de marché, j’étais à mon bureau. On sonne. Je vais ouvrir. Une dame arrive avec un petit paquet dans la main et me dit :  J’étais hier à la messe d’enterrement. Je vous ai entendu prêcher. Tenez : vous goûterez le pain fait avec les grains de blé trouvés dans les tombeaux des Egyptiens. C’est le blé kamut. 

Savez-vous quel est le plus gros être vivant qui existe actuellement et certainement le plus gros être vivant de tous les temps ? C’est le séquoia. Il s’agit d’un conifère originaire de Californie qui peut atteindre jusqu’à cent cinquante mètres de hauteur, et vivre plus de trois mille ans. Un séquoia adulte pèse des centaines de tonnes. C’est plus lourd qu’une baleine, et bien plus lourd qu’un dinosaure. Eh bien, la graine de séquoia est moins grosse qu’un grain de riz c’est-à-dire que toute l’information qui commande la formation, la croissance, les particularités du plus gros des êtres vivants que la terre ait porté est miniaturisée dans une toute petite semence.
Cette image de la graine nous fait comprendre plusieurs choses :
1. Tout d’abord, nous avons chacun, en nous, une force qui nous fera passer bien plus de 4000 ans, l’éternité !
2. Nous paraissons tout petits mais nous sommes précieux aux yeux d’un jardinier plein d’amour.
2. Troisièmement, si l’on nous donnait une graine inconnue en nous demandant de dessiner le résultat de sa germination, nous en serions incapables. Mais par contre nous savons qu’un pépin de pomme n’a jamais donné un épi de blé, qu’un bulbe de dahlia n’a jamais donné un plant de pomme de terre, qu’une graine de salade n’a jamais donné un chou, qu’un noyau de cerise n’a jamais donné un prunier. Cela signifie que chacun de nous est un et unique. Un : on ne peut pas séparer le corps et l’âme. Au Ciel nous nous reconnaîtrons. Sous quelle forme ? Nous n’en savons rien. Mais nous ne perdrons pas notre personnalité. Nous nous reconnaîtrons.
On peut dire la conséquence de tout cela en poursuivant l’image.
Un grand-père racontait un jour à son petit-fils que rien n’est plus beau qu’un arbre. «  –  Regarde, regarde les arbres comme ils travaillent.  –  Qu’est-ce qu’ils font grand-père ?   –  Ils rattachent la terre au ciel. Et cela, c’est très difficile. Regarde ce tronc rugueux, tu vois. C’est comme une grosse corde. Il y a même des n uds dedans. Mais à chaque bout, les fils de la corde se desserrent et s’élargissent pour s’accrocher au ciel et à la terre. On les appelle des branches en haut et des racines en bas. Mais c’est la même chose. Les racines cherchent leur chemin dans le sol de la même manière que les branches cherchent leur chemin dans le ciel.   –  Mais, grand-père, c’est plus difficile d’entrer dans le sol que dans le ciel !   –  Eh non ! mon fils. Si c’était vrai, les branches seraient droites. Et vois comment elles sont tordues sur le vieux pommier ! Elles doivent aussi chercher leur chemin. Elles poussent. Elles changent de direction. Elles ont parfois bien plus de mal que les racines.  –  Et qu’est-ce qui leur donne tout ce mal, grand-père ?. — C’est le vent. Le vent voudrait séparer le ciel et la terre. Les arbres tiennent bon. Mais c’est une sacrée bataille. » 
Il n’y a pas, hélas, que le Vent du Saint-Esprit. D’autres vents cherchent à nous détacher du Ciel.
Planter ses branches dans le Ciel, est-ce que ce n’est pas perdre du temps ? Est-ce que cela ne nous empêche pas de nous occuper des choses sérieuses de la terre ? Le concile Vatican II a cette belle expression : « le message chrétien ne détourne pas les hommes de la construction du monde et ne les incite pas à se désintéresser du sort de leurs semblables : il leur en fait au contraire un devoir plus pressant. » 
Mais ce devoir est plus simple parce qu’il a alors tout son sens, c’est à dire à la fois sa direction et sa signification. Le Ciel c’est le Bon Sens.
L’Ascension ne dévalue pas le sérieux des tâches humaines, mais elle nous dit que notre but est ailleurs et que si nous voulons avoir les pieds sur terre, il faudrait bien avoir un peu la tête au ciel.
Amen !