Jeudi 8 mai 2025 Le pain descendu du Ciel.
Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 6, 44-51) : « En ce temps-là, Jésus disait aux foules : « Personne ne peut venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire, et moi, je le ressusciterai au dernier jour. Il est écrit dans les prophètes : Ils seront tous instruits par Dieu lui-même. Quiconque a entendu le Père et reçu son enseignement vient à moi. Certes, personne n’a jamais vu le Père, sinon celui qui vient de Dieu : celui- là seul a vu le Père. Amen, amen, je vous le dis : il a la vie éternelle, celui qui croit. Moi, je suis le pain de la vie. Au désert, vos pères ont mangé la manne, et ils sont morts ; mais le pain qui descend du ciel est tel que celui qui en mange ne mourra pas. Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. »
Une amie qui ne croit pas à la messe me disait un jour : si un homme âgé dit, en montrant la photographie d’une femme sur le buffet de sa cuisine : « C’est ma femme. » Tout le monde comprend qu’il veut dire : « C’est une photographie. Elle me rappelle que j’ai eu une femme qui avait ce visage. Ce bout de carton me rappelle l’amour que nous avions l’un pour l’autre. » Et elle concluait : « Jésus n’en dit pas plus quand il dit : « C’est mon corps »… Que répondre ?
Premièrement, Jésus ne dit pas « C’est mon corps » mais « Ceci est mon corps ». La différence est importante. Deuxièmement, Jésus prononce cette parole au cours d’un repas liturgique, la veille de sa Passion. Ce n’est pas un simple repas d’adieu, comme on le dit parfois. C’est une célébration à laquelle les Juifs accordent beaucoup d’importance. Une célébration qui a lieu une fois par an et qui est très solennelle. Troisièmement, quand beaucoup de disciples s’en vont scandalisés que Jésus puisse dire qu’il donne sa chair à manger, Jésus n’essaie pas de les retenir en disant : « Attendez les amis, c’est symbolique. Ce n’est qu’une évocation »…
Alors comment comprendre les paroles de Jésus ? … Un prêtre rapporte un fait qui l’avait beaucoup ému et lui avait permis de mieux entrer dans le mystère de l’Eucharistie. Comme tous les jeunes de son âge, pendant la guerre, il avait été envoyé aux chantiers de jeunesse. Dans ce milieu, les garçons éloignés de leur famille attendaient impatiemment l’arrivée du courrier, surtout ceux qui avaient laissé une fiancée au village. Sans le vouloir, un jour, il surprend le visage de l’un de ses camarades, s’illuminant au moment où on lui remet une lettre. Il le voit se mettre un peu à l’écart, décacheter l’enveloppe, puis lire et relire la missive. Et le jeune fiancé fait ce geste surprenant : il froisse dans sa main la feuille de papier, patiemment, longuement… Puis, petit bout après petits bouts, il porte à sa bouche et avale toute la lettre. Sans doute voulait-il soustraire cette précieuse missive au risque qu’elle soit lue par des yeux malveillants. Mais surtout, ce garçon ne venait-il pas de découvrir l’intuition de la communion ?!… Pour supporter l’éloignement, les conditions difficiles du chantier de jeunesse, la promiscuité, l’angoisse, l’incertitude face à l’avenir, il avait besoin de la force de l’Amour de sa fiancée. Manger son écriture, la feuille sur laquelle elle s’était appliquée, le papier auquel elle avait confié son amour, c’était pour lui recevoir de l’espérance et de la paix. À la messe, quand nous communions, nous recevons l’amour de Jésus pleinement déployé sur la croix.
La différence avec la communion par la lettre c’est que nous recevons Jésus lui-même, en personne, et pas seulement un signe de sa Présence. Pourquoi ? Nous distinguons trois sortes de présence : la présence physique (je suis ici avec mon corps), la présence spirituelle (je suis présent dans le cœur de mon ami). On peut être présent physiquement et absent spirituellement. Les enfants le perçoivent bien quand ils disent « Dis maman, tu m’écoutes ? » Maman était dans la lune !… L’idéal c’est que les deux coïncident, présence physique et présence spirituelle. Et puis il y a la présence symbolique. Dans la famille, par exemple, nous conservons le briquet à essence de mon grand-père défunt. Ce briquet nous rappelle mon grand-père et tout ce qu’il a fait pour nous. A d’autres personnes, ce briquet ne rappelle rien, mais dans la famille il nous fait penser immédiatement au grand-père, à son sourire, à ses histoires… Le briquet est un signe. Est-ce que cela suffit pour dire ce qu’est l’hostie consacrée ? Non! Car le briquet rend présent grand-père dans mon esprit mais grand-père n’est pas là ni spirituellement, ni physiquement. Or, quand on aime quelqu’un, on veut plus que des signes qui nous le rappellent… Imaginons une maman dont le fils est parti casque bleu à la guerre qui oppose le Hezbollah et Israël, au sud Liban. Elle est heureuse d’avoir sa photo sur le buffet de la cuisine. Elle est encore plus heureuse de recevoir une lettre… Mais la lettre date d’au moins deux ou trois jours. Et elle a peur que ce soit la dernière. Alors son plus grand bonheur c’est quand son fils revient enfin, quand il est là, réellement là. C’est pour cela qu’en ce qui concerne la présence de Jésus dans l’hostie consacrée, nous parlons de la « Présence réelle ».
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Vendredi 9 mai 2025 un pain pour vivre éternellement
Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 6, 52-59) : «En ce temps-là, les Juifs se querellaient entre eux : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? » Jésus leur dit alors : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour. En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui. De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi. Tel est le pain qui est descendu du ciel : il n’est pas comme celui que les pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. »Voilà ce que Jésus a dit alors qu’il enseignait à la synagogue de Capharnaüm. »
Pourquoi avoir inventé un terme aussi compliqué – transsubstantiation – pour expliquer la « présence réelle » ? Le mot est plus compliqué que ce qu’il signifie. Le mot substance, au sens philosophique, est ce qui répond à la question : « Qu’ y a-t-il là-dessous (sub-stans) ? » Pour le dictionnaire Larousse, est « substantiel » ce qui est nourrissant ou essentiel. L’Eucharistie est bien l’un et l’autre ! Les apparences ne sont pas modifiées. Sinon, l’Eucharistie ne serait pas un aliment assimilable. En résumé, parler de transsubstantiation, c’est affirmer que la réalité est modifiée dans son être et non dans son paraître.
L’homme ne peut faire que des transformations. Dieu seul peut changer du pain en son corps. Dieu seul, par la parole du prêtre, peut faire que la réalité du pain devienne la réalité du Corps du Christ, que la substance du vin devienne la substance du sang du Christ ressuscité.
Je me rappelle cette anecdote. Au cours d’une messe, plus précisément au moment de l’offertoire, ceux qui l’avaient préparé avaient cru bon d’orchestrer une belle chorégraphie pour évoquer l’offrande des joies et des misères de l’humanité. Mais à la fin de la messe, une dame, offusquée que des filles et des garçons aient pu danser devant l’autel dans une église, vient trouver le célébrant pour lui dire son indignation. Calmement, le prêtre lui dit : « Cela vous a peut-être choquée, mais pensez qu’aux noces de Cana, quand Jésus a accompli son premier miracle en changeant l’eau en vin, il est sûr et certain qu’on a exécuté des danses » … Et la dame lui répond avec une candeur époustouflante : « Oui, mais aux noces de Cana il n’y avait pas la présence réelle. »
Le corps actuel de Jésus est son Corps de Gloire ; dans le Saint Sacrement, il est là, sous une humble apparence. C’est la réalisation suprême en ce monde de sa promesse : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28,20). Quand nous portons la communion, nous sommes porteurs d’une rencontre, de la plus extraordinaire des rencontres entre le Créateur et sa créature, dans le geste le plus ordinaire qui soit de prendre et de manger.
L’histoire s’est passée à Colombey-les-deux-églises, où le général de Gaulle passait sa retraite. On sait qu’il était catholique pratiquant. Un jour, il s’est trouvé à la fin de la file de communion. Le prêtre n’avait pas prévu assez d’hosties et, pour que tout le monde puisse communier, il a dû partager les dernières en deux. Et le général n’a eu qu’une moitié d’hostie. Après la messe, sur le parvis, le Père curé lui présente ses excuses pour son imprévoyance. Le général lui répond : « Monsieur le curé, le dogme de la transsubstantiation aurait-il changé ? »… C’est vrai : le Seigneur est présent dans une parcelle d’hostie autant que dans une grande.
« Je t’aime tellement que je te mangerai. » L’aimant et l’aimé désirent ne faire qu’un. C’est cela la communion. C’est Jésus qui se donne corps et âme pour faire grandir, pour réconforter, pour consoler, pour extirper du mal, pour donner la capacité de se donner. Un détail important de la messe : juste avant la communion, presque subrepticement, le prêtre met un petit morceau d’hostie consacrée dans le calice du précieux sang. Qu’est-ce que cela signifie ? Quand le corps et le sang sont séparés, c’est qu’il y a eu mort et mort violente. Le fait de les réunir, c’est rappeler que Jésus est ressuscité. A chaque messe, nous communions à la vie du Ressuscité.
Au catéchisme, un garçon s’est trompé en récitant : « Jésus a pris son Corps et a dit : « Ceci est mon pain » … Sa catéchiste a avoué que c’était pour elle une révélation. En effet, le pain ne peut devenir corps du Christ que si l’on a dit avant que le Corps du Christ est devenu pain donné en nourriture pour la vie du monde ! Autre témoignage d’un pratiquant : « Un dimanche, j’avais plein de choses à faire, j’avais décidé de ne pas aller à la messe mais je suis quand même allé acheter mon pain. Je me suis dit tout d’un coup : tu sacrifies la messe mais pas la boulangerie, voilà que tu te prives de Celui qui a donné sa vie en nourriture… »
Les bonus : (3472) 🔴”Extra omnes”, les portes de la Sixtine se sont refermées derrière les cardinaux – YouTube