Dimanche 30 mars 2025 4° de Carême C Laetare Le Père prodigue

Frères et sœurs, Cette parabole est la plus connue des paraboles de Jésus. On l’appelle la parabole du Fils prodigue, mais sans doute vaudrait-il mieux l’appeler la parabole du Père Prodigue. Dieu y est révélé comme le Prodigue. Comme un prodigue il jette son amour par les fenêtres. Comme un prodigue il gaspille sa Miséricorde. Comme un prodigue il dépense son pardon sans compter. Comme un prodigue, il prend le risque que les bénéficiaires profitent de lui.

C’est une histoire en quatre actes.

1er acte : une rupture. Son fils cadet quitte la maison. Le péché c’est la rupture d’alliance. C’est le refus de vivre dans la dépendance, c’est préférer vivre dans l’oubli de Dieu, dans les dispersions. Ce sont les distractions pascaliennes :  j’absolutisme mon ego, mon moi, j’idolâtre les relations aux autres, mon dieu – avec un petit « d », c’est le monde (il me procure de la jouissance), c’est la nature (je recherche les pouvoirs dans l’occultisme, je recherche les émotions dans la drogue…). Eh oui, quand on retire Dieu, on idolâtre forcément quelque chose. L’homme est comme le panthéon : sa clef de voute est une ouverture qui attend Dieu. Si vous ne recevez pas le Vrai Dieu, il faut trouver un dieu de substitution. Si vous n’atteignez pas le Paradis d’amour, vous cherchez les parodies de l’amour. Si vous n’avez pas l’effet Père, vous vivez dans l’éphémère. Si vous loupez les parfums d’éternité, vous vous contentez des parfums d’éther.

2ème acte : la descente aux enfers et l’escalier en colimaçon.

A plus ou moins brève échéance, il tombe dans la déchéance. Il vit dans la famine. C’est la souffrance de ceux qui vont au bout de la dispersion. Ils connaissent le vide qui fait dire : « je n’ai plus rien à perdre ». C’est une image de la déchéance de son humanité.  Il aurait bien voulu les gousses mais personne ne les lui donnait. Mais en fait, ce dont il a faim, c’est le don, la relation d’amour. On peut penser que pour le moment il ne ressent pas plus que la « contrition de l’estomac ». Dieu s’en contente. Par le fils cadet, Jésus nous met en scène la pauvre humanité qui ne connaît que comme un cyclope, ces personnages de la mythologie qui n’ont qu’un seul œil. Le cadet cyclope fait sa mise en scène. Il cherche le ton. Il apprend son petit laïus… Le rideau tombe. (Comment cela se fait-il que ce Père ait deux garnements qui n’aient rien compris ? On peut penser que c’est parce qu’il manque la maman. D’où l’importance de prendre chez soi, comme saint Joseph, La Vierge Marie.)

3ème acte : le Père l’attendait. Tous les jours avec un petit escabeau, il allait au bout du jardin, il installait l’escabeau, montait dessus pour scruter l’horizon et voir si le fils ne revenait pas.

« Ce qui m’a fait revenir, c’est le regard de mon papa »  On se rappelle le cri de Dieu, dans le Livre de la Genèse, juste après le péché originel :« Homme où es-tu ? où es-tu ? » Il l’aperçoit, il est pris de pitié : « voilà mon garnement. Faisons celui qui ne voit rien. D’où sors-tu toi ? »

Si l’on en croit le tableau de Rembrandt, Le Père, en fait, est un cheik (prononcer chir), un Maître, un Roi. Le protocole lui interdit de courir. Par dignité, pour le protocole, il doit marcher lentement, de façon solennelle.

Or là, il court ! Pour nous donner l’étreinte.

Avec ce père prodigue, on est loin du tribunal du surmoi toujours intransigeant, culpabilisant, moralisateur.

Il couvre le fils cadet de baisers. Arrêtez-vous sur cette phrase.

Le fils essaie de dire quelque chose, de redire ce qu’il avait préparé, ce qu’il avait répété.  Mais le ton n’y est plus… Car il avait préparé en fonction de ce que lui disait son surmoi… Il est en train de se rendre compte que son Paternel ce n’est pas le surmoi. Vous vous rendez-compte, il dit : « Père »… !

Le Père ordonne qu’on lui redonne sandales, anneau, manteau.

Sandales au pied : seulement les hommes libres ont des sandales.

L’anneau à cacheter : c’est l’équivalent de la carte bancaire avec le numéro de code.

Le manteau : nous sommes  restaurés dans notre dignité baptismale. Le rideau tombe. On est tous très émus…

4ème acte : c’est la confrontation avec le frère ainé qui a des mots très durs. Son frère a trainé « avec des filles ». Est-ce que souvent nous ne sommes pas durs avec les pécheurs justement parce qu’ils ont fait ce que nous aimerions faire… ! Il faudrait citer tous les passages de Jésus sur la paille et la poutre, la mesure dont nous nous servons pour les autres qui servira aussi pour nous…

Et cette parole extraordinaire : Le Père répondit : “Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi. Il fallait festoyer et se réjouir ; car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé !” ». « Et tout ce qui est à moi est à toi » : c’est la même parole que l’on trouve en Jn 17.  A quelques heures de sa Passion, Jésus prie : « Moi, je prie pour eux ; ce n’est pas pour le monde que je prie, mais pour ceux que tu m’as donnés, car ils sont à toi. Tout ce qui est à moi est à toi, et ce qui est à toi est à moi ; et je suis glorifié en eux. »

Quand vous recevez la communion vous pouvez entendre : « tout ce qui est à moi est à toi » et vous répondez « tout ce qui est à moi est à toi ». C’est la réciprocité du don, le Seigneur Esprit-Saint en personne.

Les bonus : “J’ai été guérie d’une fibromyalgie sur la route de Compostelle” Claire Colette – YouTube