16 juin 2024 11° dimanche ordinaire B

Frères et sœurs, Quand Ezéchiel annonce que le Seigneur prendra une tige et la plantera sur une haute montagne, que cette petite tige poussera et sa ramure couvrira la terre, on peut penser qu’il s’agit de Jésus le meilleur produit du Peuple d’Israël et qui maintenant fait produire de succulents fruits à ceux qui sont greffés sur lui.

Jésus le confirme dans l’évangile. Son Royaume sera toujours fait de petites choses. A l’occasion du 80° anniversaire du débarquement, nous avons pu entendre avec sa croix en or autour du cou, une « grande fille » comme elle dit en souriant : 96 printemps. En revanche, Monique était encore une petite fille en 1940, quand, avec ses parents et sa sœur, elle a pris la route, avec d’autres réfugiés, pour fuir les Allemands. Au bout de trois jours, alors qu’ils n’ont plus rien, une camionnette de soldats français les croise et leur jette une boîte de bœuf bouilli en conserve. Ils sont si contents que son père sort son appareil photo pour immortaliser le « festin ». Elles sont tout sourire. Las, des avions allemands passent à ce moment. Sa mère se jette sur Monique, son père sur sa sœur. Ils mourront tous les deux dans le bombardement. « Elle me serrait fort, j’avais très peur, elle priait, elle disait : “Cœur Sacré de Jésus, protégez-nous, Cœur Sacré de Jésus, protégez-nous, Cœur Sacré de Jé… », avant de s’arrêter net : « Je suis touchée. – Moi aussi », répond son mari. Ils meurent sur le coup. Mais ils ont sauvé leurs filles. 

Le monde tient par ce genre d’actes héroïques. On rêverait que les journaux télévisés en fassent l’énumération chaque soir. Quelle belle stimulation pour tous les téléspectateurs !

Un jeune papa dont je fais connaissance m’apprend qu’il est une sorte de douanier. Avec les gendarmes, il circule sur la route pour contrôler les camionneurs, notamment. Un jour ils arrêtent un camion bulgare. Pour échanger avec le chauffeur, ils utilisent un traducteur sur le smartphone. C’est pratique mais compliqué. Le chauffeur a un comportement bizarre. Il parait timide mais l’est-il vraiment ? N’est-il pas un peu dans la manipulation ? Toujours est-il qu’il ne présente pas les papiers demandés. Ce papa contrôleur me dit : « J’étais en droit de lui dire : « vous n’êtes pas en mesure de me présenter les documents, je vous verbalise ». Mais j’ai joué la carte de la confiance. Quand le chauffeur m’a présenté un gros paquet de papiers, j’ai pris le temps de feuilleter et j’ai trouvé tout ce que nous demandions. Il n’était pas manipulateur. Il était brouillon. » Ce papa me racontait ce fait sans esprit de vanité mais comme quelque chose de naturel. L’aumône ne se fait pas qu’avec de l’argent…

Il y a au moins deux enjeux. D’abord, le salut personnel de chacun : saint Paul dit clairement : « Car il nous faudra tous apparaître à découvert devant le tribunal du Christ, pour que chacun soit rétribué selon ce qu’il a fait, soit en bien soit en mal, pendant qu’il était dans son corps. »

Autre enjeu : l’avenir de notre société et l’avenir de notre Eglise. Puisque ce dimanche nous rendons grâce à Dieu pour 8 paroissiens qui ont œuvré dans une grande discrétion pendant des décennies au service de leur paroisse, je rappelle avec humour une « fiche technique » souriante.

Le bénévole, (activus benevolus) est un mammifère bipède qu’on rencontre surtout dans les associations, où il peut se réunir avec ses congénères. Les bénévoles se rassemblent à un signal mystérieux appelé “convocation”. On les rencontre aussi en petits groupes dans divers endroits, quelquefois tard le soir, l’œil hagard, le cheveu en bataille et le teint blafard, discutant ferme la meilleure façon d’organiser un rassemblement, de préparer une journée, un flyer, une année pastorale,  les prochaines compositions florales, ou la Pâque des malades,  ou de dépenser le moins possible pour ne pas mettre la paroisse dans le rouge.  

L’ennemi héréditaire du bénévole est le “yaqua”. Le yaqua est aussi un mammifère bipède, mais il semble ne connaître que quelques lettres “il n’y a qu’à” ce qui explique son nom. Le yaqua, bien abrité dans la cité anonyme, attend. Il attend le moment où le bénévole fera une erreur, un oubli, pour bondir et lancer son venin qui atteindra son adversaire et provoquera chez celui-ci une maladie très grave : le “découragement”. Les premiers symptômes de cette implacable maladie sont visibles rapidement : absences de plus en plus fréquentes aux réunions, intérêt croissant pour son jardin, sourire attendri devant une canne à pêche, et attrait de plus en plus vif qu’exercent un bon fauteuil et internet sur le sujet atteint. Les bénévoles décimés par le découragement risquent de disparaître et il n’est pas impossible que dans quelques années, on rencontre cette espèce uniquement dans les zoos où comme tous ces malheureux animaux enfermés, ils n’arrivent plus à se reproduire. Les yaquas, avec leur grande langue, viendront leur lancer des cacahuètes pour tromper l’ennui. Ils se rappelleront avec nostalgie le passé pas si lointain où le bénévole abondait et où on pouvait le traquer sans contrainte.

Le trait est très forcé évidemment. Aujourd’hui nous prions pour qu’il y de moins en moins de Yaqua et plus d’Actus Benevolus !

Il en va de l’avenir de notre Eglise et de notre société. Pourquoi ? Jésus a formulé le secret du bonheur : « Il y a plus de joie à donner qu’à recevoir ». Aujourd’hui beaucoup de « ismes » nous poussent au repli : individualisme, relativisme, aquoibonisme (à quoi bon ?). L’image de la graine semée nous dit qu’il faut prendre le risque de se donner.

Ah si nous pouvions faire découvrir la grâce de vivre avec Jésus, par Jésus, en Jésus. Par Lui, avec Lui, et En Lui. On le sait : le Pap François nous invite à être tous des « disciples missionnaires ». Aux JMJ de Rio de Janeiro il avait dit aux jeunes qu’il fallait quitter le canapé avec le smartphone.  Un français a traduit la pensée du Pape François au sujet de ses invitations répétées à être des disciples missionnaires par un beau jeu de mots : le chrétien doit quitter le vieux divan pour annoncer le Dieu vivant.

L’abbé Pierre disait : « à la fin de votre vie, on ne vous demandera pas si vous avez été croyant mais si vous avez été crédible ». Suis-je crédible ?

Les bonus: “L’euthanasie est une rupture anthropologique majeure !” – Brieuc Leroy et Sandrine Dogor Such (youtube.com)