Lundi 8 septembre 2025 Nativité de la Vierge Marie
Lecture de la lettre de saint Paul apôtre aux Romains : « Frères, nous le savons, quand les hommes aiment Dieu, lui-même fait tout contribuer à leur bien, puisqu’ils sont appelés selon le dessein de son amour. Ceux que, d’avance, il connaissait, il les a aussi destinés d’avance à être configurés à l’image de son Fils, pour que ce Fils soit le premier-né d’une multitude de frères. Ceux qu’il avait destinés d’avance, il les a aussi appelés ; ceux qu’il a appelés, il en a fait des justes ; et ceux qu’il a rendus justes, il leur a donné sa gloire. »
Avec la Vierge Marie née immaculée, conçue immaculée, une question se pose : puisqu’elle était programmée pour le bien, était-elle libre ?
Dans son œuvre majeure, le Traité de l’amour de Dieu (TAD), François de Sales développe, non sans humour, une sorte de parabole qui nous éclaire pour réfléchir à l’une des questions parmi les plus centrales de l’éthique chrétienne : quel est le rapport entre la liberté de la personne humaine et la grâce divine ? Les nombreuses et vives polémiques soulevées au cours des siècles lors de l’examen de cette question témoignent de son caractère décisif. Lui donner une réponse satisfaisante, c’est en effet avoir une juste compréhension de l’autonomie de l’homme devant Dieu. Prêtons donc attention aux détails de cette parabole proposée par François de Sales.
Chaque être humain, affirme ce dernier, est comparable à un ” apode “, c’est-à-dire à un oiseau possédant de très grandes ailes et de toutes petites pattes (La dénomination ” apode ” est empruntée à Aristote) ; pensons, par exemple à un albatros. Lorsqu’un tel oiseau se saisit des mouvements ascendants de l’air et se laisse porter par eux, il vole avec une telle agilité et une si grande majesté que cela semble ne lui demander aucun effort. En revanche, dès qu’il se pose sur le sol, il devient lourdaud, disgracieux, et bien incapable, sans le secours du vent, de prendre son envol. Il a beau agiter ses grandes ailes, il n’en résulte que de ridicules bonds en avant. Et plus il fait des efforts frénétiques pour se soulever, plus il est renvoyé à son impuissance.
Il en est de même pour chacun de nous, dit saint François de Sales. Quand nous nous tenons vraiment dans notre élément, nous sommes comme les apodes dans le vent : agiles, heureux, prenant appui sur les courants de vie pour déployer toutes les potentialités inscrites en nous. Or notre élément, notre écosystème pourrait-on dire , c’est l’amour (agapé) ; car Dieu, qui nous a créés à son image, est Amour (1 Jn 4,8). Au contraire, quand nous quittons notre élément, quand nous refusons de tendre les ailes au vent de l’amour de Dieu et d’autrui, c’est-à-dire quand nous développons des connivences avec les puissances du péché, alors, comme les apodes sur le sable mouvant, nous nous enlisons. En raison du péché du monde, nous sommes tous des apodes cloués au sol, insiste saint François de Sales. C’est pourquoi nous avons beau agiter vigoureusement nos ailes, si le vent de Dieu ne souffle pas, nous sommes condamnés à n’effectuer que d’infructueux ” essais d’amour ” ! En d’autres termes, la reconquête de notre autonomie dépend totalement de la bonté du Créateur. Conviction qui oblige l’homme à une totale remise de lui-même à l’Autre, et qui en outre n’est pas sans présenter un caractère angoissant, tant elle doit s’accompagner d’une profonde confiance. Croire ou s’enliser, tel est le dilemme ! Mais précisément, saint François de Sales, à la suite d’une épreuve terrifiante vécue dans sa jeunesse en raison d’un doute radical concernant la possibilité d’être sauvé, a acquis au moment où il rédige le Traité une conviction devenue inébranlable : Dieu, en son être même, est compassion et nous aime d’un amour infini. Aussi ne peut-il rester insensible devant notre malheur. Il lui faut envoyer le vent favorable à notre libération.
Toutefois, par bien des aspects, ce vent est désarçonnant. Il remplit certes nos coeurs, mais toujours ” à l’imprévu, avant que nous y ayons ni pensé, ni pu penser “. De plus, il se manifeste avec une ” douce violence “, ” pour nous saisir, nous émouvoir, relever nos pensées et nos affections “, et finalement nous remettre dans le courant de l’amour évangélique …
Avouons-le, cette tension de la passivité et de l’activité est parfois rude à assumer, tant nous sommes de ” drôles d’oiseaux ” ! Mais, quand on accepte de la vivre – saint François de Sales en est une preuve éclatante -, elle permet de voler parfois très haut, avec grâce, mais jamais sans la Grâce !
La Vierge Marie est en fait la plus libre des créatures. Comme elle aime Dieu, lui-même a tout fait contribuer à son bien, puisqu’elle est appelée selon le dessein de son amour. Il la connaissait, il l’a aussi destinée d’avance à être configurée à l’image de son Fils, pour que ce Fils soit le premier-né d’une multitude de frères. Celtel qu’il avait d’avance destinée, il l’a aussi appelée ; celle qu’il a appelée, il en a fait une juste, et celle qu’il a rendue juste, il lui a donné sa gloire.
Les bonus : (2313) Pourquoi MARIE est si importante pour les CATHOLIQUES ? – YouTube