25 juin 2024 discernement

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu (Mt 7, 6.12-14) : «En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Ne donnez pas aux chiens ce qui est sacré ; ne jetez pas vos perles aux pourceaux, de peur qu’ils ne les piétinent, puis se retournent pour vous déchirer.Tout ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le pour eux, vous aussi : voilà ce que disent la Loi et les Prophètes.Entrez par la porte étroite. Elle est grande, la porte, il est large, le chemin qui conduit à la perdition ; et ils sont nombreux, ceux qui s’y engagent. Mais elle est étroite, la porte, il est resserré, le chemin qui conduit à la vie ; et ils sont peu nombreux, ceux qui le trouvent. »

Que veut nous dire Jésus quand il dit : « ne jetez pas vos perles aux pourceaux, de peur qu’ils ne les piétinent, puis se retournent pour vous déchirer. » Qui Jésus traite-t-il de pourceaux ? Dans la culture juive, en dessous du cochon, il n’y a pas grand-chose.

En fait, Jésus nous invite à partager nos trésors avec discernement. Tout le monde ne peut pas recevoir à leur juste valeur certaines confidences, certains éclairages même. S’il emploie le terme de pourceau pour désigner ceux à qui il vaut mieux ne pas livrer les perles de notre foi, le cœur de notre vie intime avec Jésus, les diamants du mystère chrétien, c’est pour frapper les esprits. Il nous donne là un conseil à ne pas prendre à la légère.   Cela rejoint son autre conseil d’être candide comme les colombes mais prudents comme les serpents. Jésus nous invite à nous livrer avec prudence.  

Notons toutefois que Jésus parle de pourceau et non pas de porc. C’est mignon un petit pourceau. Jésus dit aussi avec tendresse ce que son apôtre saint Paul explique dans sa première lettre aux Corinthiens : « Frères, quand je me suis adressé à vous, je n’ai pas pu vous parler comme à des spirituels, mais comme à des êtres seulement charnels, comme à des petits enfants dans le Christ. C’est du lait que je vous ai donné, et non de la nourriture solide ; vous n’auriez pas pu en manger, et encore maintenant vous ne le pouvez pas ». C’est vrai dans la communication : C’était avant la levée du rideau de fer en 1989, une firme de sondage décida d’effectuer un sondage d’envergure mondiale. La question était la suivante : « Quelle est votre opinion sur la pléthore d’aliments d’un côté et la pénurie d’aliments dans le reste du monde? » Le sondage fut un flop, car la question n’était pas formulée assez clairement :  en Afrique, on ne savait pas ce qu’était la pléthore d’aliments, en Europe de l’Ouest, on ne savait pas ce qu’était une pénurie, en Europe de l’Est, on ne savait pas ce qu’était une opinion et, aux États-Unis, on ne savait pas ce qu’était le reste du monde… Au niveau relationnel ou ecclésial, il est bon de se dire que certaines personnes étant des bébés spirituels, on doit leur parler avec simplicité et aussi délicatesse et prudence de ce qui nous fait vivre. Par exemple si une religieuse explique que ce qui la définit le mieux c’est qu’elle est l’épouse de Jésus, si celui qui l’écoute comprend tout au premier degré, il risque d’en faire des gorges chaudes. Et pas avec la candeur de cet enfant qui demandait candidement à une religieuse : « Comment cela se passe : c’est vous qui montez ou c’est Jésus qui descend ? » Et que dira le sceptique pas très bienveillant si c’est un prêtre qui essaie de lui expliquer que son célibat l’ouvre aussi à cette dimension sponsale, et qu’il peut parfaitement dire la prière de sainte Elisabeth de la Trinité : « ô mon Christ aimé crucifié par amour je veux être une épouse pour votre cœur, je voudrais vous couvrir de gloire, je voudrais vous aimer…jusqu’à en mourir!». Il vaudrait mieux que le prêtre commence par faire découvrir que son célibat lui permet de représenter Jésus qui est resté célibataire lui aussi, pour le Royaume. De même, parfois, dans une ambiance de bureau, une entreprise, une association, si deux personnes sont très amies, il leur faut discerner si cette amitié n’a pas à se faire discrète pour ne pas risquer de susciter de la jalousie.   C’est une question de pédagogie mais c’est plus que cela. C’est de l’amour pour les personnes. Vous risquez de fermer pour longtemps l’accès à la foi si vous livrez les ressorts de votre vie sans  précaution. Comment bien expliquer qu’il y a un seul Dieu, mais que c’est un Dieu-Trinité, que Jésus est Dieu, mais qu’il est aussi homme, qu’il n’y a qu’un Evangile, mais qu’il est écrit en quatre versions, que le Royaume est déjà là, mais qu’il est encore à venir… etc. Rien n’est simple, en effet, et pourtant tout est clair. Dieu nous aime tendrement, et il nous l’a dit en Jésus, sa Parole demeure chair.

Ne pas jeter ses perles aux pourceaux, c’est aussi discerner  s’il est temps ou non de laisser s’approcher de la communion certains enfants et certains adultes. Dans le Livre de l’apocalypse, le Seigneur fait dire à son ange : « Dehors les chiens, les sorciers, les débauchés, les meurtriers, les idolâtres, et tous ceux qui aiment et pratiquent le mensonge ! » (Décidément le Seigneur aime les métaphores animalesques !)  

Jésus tu nous dis que le Seigneur Esprit-Saint peut rattraper nos bévues et se servir de nos erreurs pour bousculer, questionner, éclairer, mais inspire nous la pédagogie, le flair, et la jugeote pour ne pas jeter les perles que tu nous confies aux pourceaux.  

Les bonus : #short “Le grain de riz” / astuce du P.Cantalamessa pour prier (youtube.com)