7°« C » 23 février 2025 Malpas et Solignac

Frères et sœurs, pourquoi ce que nous venons d’entendre est inaudible dans notre société ?

Parce que la conception de l’homme répandue actuellement dans le monde, malgré l’humanisme prétendu, et celle que nous professons dans l’Eglise, sont diamétralement opposées. La mentalité actuelle est de plus en plus utilitariste: on regarde les hommes en évaluant ce qu’ils nous coûtent et ce qu’ils nous rapportent, et c’est ce qui définit la valeur de leur existence et leur droit à la vie; une simple chose parmi les autres choses. Dans nos lois toutes récentes, l’homme commençant n’est plus qu’un matériau de laboratoire pour la recherche. Au contraire, chrétiens, nous regardons les autres comme étant l’image de Dieu en ce monde et sa ressemblance; nous les voyons revêtus du sang de Jésus comme d’un manteau de dignité, même les pires. Défigurant l’image, pécheurs, ils ont encore droit à un immense respect, à cause du regard que Dieu lui-même porte sur eux. Nous l’avons entendu dans la première lecture: le roi Saül hors de lui par jalousie cherchait à tuer David. Or que fait celui-ci lorsque son ennemi est à sa merci? « Comment pourrais-je porter la main sur celui qui a reçu l’onction du Seigneur et rester impuni? » Saül a reçu l’onction des rois, qui rend sa personne sacrée. Or il y a bien plus que Saül, dans la personne de ceux qui nous entourent: « Par son Incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni à tout homme » affirme le Concile.

Pour nous faire avancer sur ce chemin du pardon, Le Seigeur nous donne des exemples.  Rappelons le témoignage de Maïti Girtanner qui a bouleversé des millions de téléspectateurs sur la force du pardon. Elle a révélé les ressources formidables de la volonté, de l’intelligence et de la foi capables de transcender la souffrance et de recréer une vie riche d’espérance et de fécondité.

            A 16 ans déjà Maïti est promise à une brillante carrière internationale de pianiste. Mais en 1940, c’est la guerre. Parce qu’elle parle parfaitement et le français et l’allemand, parce que la ligne de démarcation passe au milieu de la rivière qui longe la propriété de ses parents dans le Poitou, elle entre dans la Résistance. Elle a 18 ans. Parce qu’elle est pleine d’astuce, elle fait passer des centaines de personnes et du courrier ultra secret en zone libre. Mais au bout de trois ans, elle est arrêtée et torturée à mort par Léo, un bourreau médecin. Par de multiples atteintes au système nerveux sensitif de la moelle épinière, il la condamne à souffrir atrocement au moindre toucher jusqu’à la fin de ses jours. Providentiellement, elle en sort vivante. Mais même après huit années d’hôpital, elle continuera à souffrir et ne jouera plus de piano. Elle deviendra professeur de philo et fera de l’accompagnement spirituel individuel. En 1984, Maïti reçoit un coup de fil. Elle reconnaît tout de suite la voix de son bourreau : il a réussi à retrouver sa trace. Très malade et terrifié par la mort, il n’y a qu’une personne avec qui il souhaite en parler, celle qui, sous la torture, avait si bien décrit  l’après mort. Alitée à cause d’un accès de douleurs, Maïti s’entend répondre :  « Venez ».  Elle parle longuement de la mort à Léo. Léo écoute et dit :  « Cela fait du bien ce que vous me dites. Mais êtes-vous sûre que Dieu peut recevoir quelqu’un comme moi ? »  Maïti rectifie :  « Un homme qui a fait tant de mal ».  Par ces mots, elle cherche à le mettre en vérité face à lui-même Elle lui révèle que, depuis quarante ans, elle prie pour lui. Elle lui explique que l’amour de Dieu est tel qu’il peut tout transformer en amour.  « Que puis-je faire maintenant ? »  demande Léo.  « Cherchez au fond de vous-même le lieu ou vous avez laissé Dieu habiter en vous, car Il habite en ses créatures même les plus enténébrées. Parlez à Dieu comme un enfant, et donnez de l’amour à tous ceux à qui vous le pouvez. »  Puis Maïti se soulève et embrasse Léo :  « Je me suis sentie prise par un désir fou de prendre cet homme dans mes mains pour le déposer dans le coeur de Dieu », raconte-t-elle. Léo a murmuré :  « Pardon ». Rentré dans son pays, l’homme respecté qu’il était devenu, révélera enfin à sa famille et à ses amis son passé, et fera des bonnes uvres pour se racheter.  Vous voyez, nous confie Maïti Girtanner, le mal n’est pas le plus fort  . Longtemps Maïti a téléphoné à sa veuve pour la soutenir.

            Ensuite, il nous faut prendre le chemin de profondeur que Jésus nous indique. Il creuse notre coeur. Il nous invite à descendre comme un escalier intérieur, un escalier de huit marches. Car on n’arrive pas du premier coup à une telle profondeur. Plus on descend cet escalier, plus il faut de la lumière : celle de la prière.

– 1ère  marche : choisir de ne plus rencontrer son ennemi. L’éviter. Se redire les trois mots de la miséricorde : POUR LE MOMENT.

– 2ème  marche :  chercher à se confier à une personne sûre qui va m’écouter jusqu’au bout et qui va ainsi faire droit à ce qui a été profondément blessé en moi.

– 3ème  marche : Eviter de dire du mal de lui sur son dos, en son absence.
– 4ème  : Prier pour lui sans qu’il le sache, sans lui dire. Bénis-le Seigneur.

– 5ème  : lui trouver une qualité, trouver du bien en lui. En revanche sur ce point…

– 6ème marche : commencer à dire du bien de cette personne.

– 7ème  : Discerner :dois-je reprendre une communication avec lui ou pas ?

– 8ème  marche : Si oui, lui dire ou lui écrire des choses positives. Au fond l’aimer. L’aimer avec un coeur qui n’est plus tout à fait le même parce qu’il a demandé à Jésus sa force d’amour et de discernement. Nous avons découvert Jésus qui aime avec nous.

Aimer ses ennemis  relève plus d’une obligation de moyens que d’une obligation de résultats. Amen !

Les bonus : Les imitations de Laurent Gerra, crise de rires assurée ! – Vivement Dimanche 23 avril 2023