1er avril 2025 Brancard
Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 5, 1-16) : « À l’occasion d’une fête juive, Jésus monta à Jérusalem. Or, à Jérusalem, près de la porte des Brebis, il existe une piscine qu’on appelle en hébreu Bethzatha. Elle a cinq colonnades, sous lesquelles étaient couchés une foule de malades, aveugles, boiteux et impotents. Il y avait là un homme qui était malade depuis trente-huit ans. Jésus, le voyant couché là, et apprenant qu’il était dans cet état depuis longtemps, lui dit : « Veux-tu être guéri ? » Le malade lui répondit : « Seigneur, je n’ai personne pour me plonger dans la piscine au moment où l’eau bouillonne ; et pendant que j’y vais, un autre descend avant moi. » Jésus lui dit : « Lève-toi, prends ton brancard, et marche. » Et aussitôt l’homme fut guéri. Il prit son brancard : il marchait ! Or, ce jour-là était un jour de sabbat. Les Juifs dirent donc à cet homme que Jésus avait remis sur pied : « C’est le sabbat ! Il ne t’est pas permis de porter ton brancard. » Il leur répliqua : « Celui qui m’a guéri, c’est lui qui m’a dit : “Prends ton brancard, et marche !” » Ils l’interrogèrent : « Quel est l’homme qui t’a dit : “Prends ton brancard, et marche” ? » Mais celui qui avait été rétabli ne savait pas qui c’était ; en effet, Jésus s’était éloigné, car il y avait foule à cet endroit. Plus tard, Jésus le retrouve dans le Temple et lui dit : « Te voilà guéri. Ne pèche plus, il pourrait t’arriver quelque chose de pire. » L’homme partit annoncer aux Juifs que c’était Jésus qui l’avait guéri. Et ceux-ci persécutaient Jésus parce qu’il avait fait cela le jour du sabbat. »
Petit souvenir personnel : en septembre 1995, j’étais vicaire dans une paroisse depuis un an mais le Père curé venait de changer. Or, le curé nouvellement nommé qui devait me rejoindre avait des problèmes d’yeux. (Avouez que pour un prêtre c’est un comble d’avoir des problèmes « dieu»… !). J’ai donc dû le remplacer et faire fonction de curé pendant trois mois. Quand il a pu enfin venir prendre sa nouvelle mission, il a gentiment accepté que je prenne une semaine de vacances. Je suis parti rejoindre des amis à Brive La Gaillarde pour bénéficier de leur accueil et aussi de la communauté du Verbe de Vie d’Aubazine, toute proche. Au retour, je prends un autostoppeur, un jeune au crâne rasé, avec un énorme sac. Je charge le sac dans le coffre arrière et nous voilà partis. Avec un peu d’humour, je lui demande s’il est militaire ou moine, vu sa coupe de cheveu. Il me répond : « Qu’est-ce que ça peut vous F.O.U.T.R.E. ? » Le coup est un peu rude mais je me dis que la question était peut-être trop intrusive et que c’est à moi de me présenter. Je lui dis que je suis prêtre et qu’après trois mois de pastorale intensive en raison de l’arrêt maladie de mon curé, je suis venu me reposer etc etc.. Il ne dit rien mais ça ne lance toujours pas la conversation. Nous roulons avec le seul bruit du moteur de ma 205 diesel. Le seul bruit, pas tout à fait : je m’inquiète depuis le début d’un bruit bizarre qui provient de son énorme sac à dos. Alors au bout d’une heure de route, autant pour me rassurer si c’est possible que pour essayer de commencer enfin une conversation, je lui dis : « Je m’inquiète pour ton sac ; est-ce qu’il n’y pas quelque chose de fragile qui risque de se casser ? Est-ce que tu ne voudrais pas qu’on s’arrête pour mieux le caler ? » Il me répond « Et qu’est-ce que ça peut vous F.O.U.T.R.E. ? » A ce moment-là, j’avoue que la colère m’a pris, et comme nous traversions une petite ville où les ronds-points se succédaient, et où donc les voitures plutôt nombreuses, roulaient lentement, je me suis arrêté, et très rapidement, j’ai cliqué sur sa ceinture de sécurité, j’ai passé ma main devant le tableau de bord et j’ai ouvert sa portière en lui disant : « Nos routes se séparent ici ». Et comme c’était dit d’un ton ferme, il a obtempéré aussitôt et s’est retrouvé sur le trottoir. J’ai tiré la portière et je suis parti en trombe. Ce n’est qu’en arrivant à Yssingeaux que je me suis rendu compte que son énorme sac était resté dans la voiture. Tellement agacé par sa goujaterie alors que je lui rendais service et que j’essayais d’être gentil, je n’entendais même plus le bruit bizarre… ! Incroyable ! Et vous vous demandez peut-être ce qu’il y avait dans son sac ? « Et qu’est-ce que ça peut vous F.O.UT.R.E. ? » …POISSON D’AVRIL !
Pardonnez-moi. Mais près de la piscine de Siloé, un premier avril, il était trop tentant de faire un poisson !
Pourquoi cet homme paralysé, une fois guéri, emporte-t-il son brancard ? Pourquoi Jésus lui demande-t-il de repartir avec son grabat, sa civière, son brancard ? Pour au moins trois raisons : Le brancard devient comme un ex-voto. Autrefois, dans la grotte de Lourdes, pendaient les béquilles des personnes qui étaient désormais guéries. La civière est le signe visible de la miséricorde dont j’ai été l’objet. Elle me permet de rester dans la gratitude.Deuxièmement le brancard me rappelle que je pourrais en avoir besoin de nouveau. Il m’invite à ne pas être orgueilleux, présomptueux, à rester humble.Troisièmement, ce brancard porte les empreintes digitales de toutes les personnes qui m’ont porté une fois ou l’autre, les marques de tous ceux qui m’ont manifesté de l’amour. Depuis Jésus nous ne pouvons jamais plus dire que Dieu n’en a rien à F.O.U.T.R.E. de tous les auto-stoppeurs en route vers le Ciel que nous sommes !
Les bonus : JÉSUS POSSÈDE TOUS LES ATTRIBUTS D’ALLAH !