Mardi 18 février 2025 Bonne à rien

Aujourd’hui 18 février nous fêtons sainte Bernadette Soubirous. Quand, le 25 septembre 1863, Mgr Forcade, évêque de Nevers rencontre Bernadette à l’hospice de Lourdes, il lui propose d’être soeur de Nevers. Sainte Bernadette fait deux objections : sa pauvreté : sur ce point, l’évêque la rassure ; sa maladie : affaiblie, épuisée, Bernadette dit : ” je ne suis rien… je ne suis bonne à rien. ” Quelques jours plus tard, elle avouera à une religieuse : ” Je ne serai bonne à rien. Que voulez-vous qu’on fasse de moi ? ” Mais voici Bernadette à Nevers. Vers le 15 août 1866, elle entre à l’infirmerie, comme aide infirmière. En septembre, elle doit s’aliter. Sa plainte ? D’être bien soignée. ” Les pauvres ne sont pas ainsi traités. ” Mais l’inaction lui pèse. Lorsque soeur Emilie lui demande une prière, elle dit oui, mais elle ajoute : ” Vous prierez pour moi… Je ne suis bonne à rien. ” Bonne à rien ! Ces trois mots, on les a si souvent dits à son sujet autour d’elle ! Ils sont gravés dans ses oreilles et ils sortent spontanément de ses lèvres. Le 30 octobre 1867, ils vont être proclamés officiellement par la Mère générale, devant l’évêque de Nevers et la communauté de Saint-Gildard. Dans la matinée, celle qui est devenue soeur Marie-Bernard, avec quarante-quatre autres novices, fait les voeux temporaires d’une année. Dans les notes de retraite préparatoire à la profession, Bernadette écrit ceci : ” Ne chercher en toutes choses que Dieu seul. Dieu partout, Dieu toujours. ” Cette vue de foi va la soutenir dans l’épreuve qui l’attend. Au début de l’après-midi, a lieu la cérémonie des obédiences : chaque religieuse est appelée et reçoit un billet qui marque la maison où elle sera affectée. Pour soeur Marie-Bernard, il n’y a rien. Mais laissons la parole à Mgr Forcade, qui fait le récit de la séance : ” Pour quelle raison n’a-t-on pas appelé soeur Marie-Bernard et ne m’a-t-on pas remis pour elle une lettre d’obédience ? ” La supérieure générale se lève : ” Monseigneur, il n’a pas été possible de lui assigner une obédience : C’est une petite sotte qui n’est bonne à rien. ” Recueillons-nous et essayons de deviner la blessure faite au coeur de soeur Marie-Bernard par une telle proclamation, en un tel jour, devant une telle assistance : il y avait de quoi anéantir la petite Lourdaise devenue soeur de Nevers. Quelle est sa réaction ? Reprenons le récit de Mgr Forcade : ” Soeur Marie-Bernard, arrivez ici ! ” Elle vient s’agenouiller à mes pieds. – Vous n’êtes donc bonne à rien ? – La Mère générale ne se trompe pas ; c’est bien vrai. – Mais alors, ma pauvre enfant, qu’allons-nous faire de vous, et à quoi bon votre entrée dans la Congrégation ? – C’est justement ce que je vous avais dit à Lourdes et vous m’avez répondu que cela ne ferait rien. ” Abandonnons encore le récit et faisons silence en notre âme. Bernadette, très sensible, susceptible même, a senti dans tout son être une souffrance qu’on ne peut mesurer. Mais quelle grâce puissante lui a obtenue Notre-Dame de Lourdes ! Dans la réponse de soeur Marie-Bernard, on ne sent ni émotion, ni amertume, ni, à plus forte raison, la moindre passion. Sa réaction est empreinte de calme, de paix, de sérénité. Quelle maîtrise de soi cela suppose et quelle sainteté ! Quel beau point de départ pour une vie consacrée à Dieu ! Par le moyen de l’humiliation, le Seigneur a mis dans l’âme profonde de Bernadette le solide fondement de l’humilité. Mgr Forcade est bouleversé et ne sait que dire. La Mère Joséphine Imbert déclare : ” Cette enfant n’est capable de rien ; elle serait une charge pour la maison où nous l’enverrions. ” Monseigneur dit alors à soeur Marie-Bernard : ” Seriez-vous capable de porter quelques bols de tisane, d’éplucher les légumes ? – J’essaierai, Monseigneur. ” Dans ce mot ” j’essaierai “, quelle humilité, et quelle modestie ! Mais voici que l’évêque, guidé par l’Esprit-Saint, se ressaisit. Il s’adresse à celle qui n’est bonne à rien : ” Ma fille, je vous donne l’emploi de prier. ” Quelle joie pour Bernadette et avec quelle perfection elle remplira cet emploi ! Combien apprendront à prier en voyant le profond recueillement de Bernadette ! Mais comment faut-il entendre l’expression : bonne à rien ? Elle a été employée par la supérieure et par Bernadette elle-même. La providence a inspiré aux supérieurs de protéger l’humilité de sainte Bernadette par le moyen des humiliations. En réalité, Bernadette est bonne à beaucoup de choses, elle est douée en de nombreux domaines : elle fait de beaux travaux d’aiguille et assurait parfaitement sa charge d’infirmière. En fait, la maladie a empêché Bernadette de faire valoir ses talents : intelligence, habilité manuelle, goût de l’ordre, don de sympathie. De toutes les paroles de Bernadette, celle-ci est, peut-être, la plus importante. Elle a exprimé d’abord la réaction d’une sensibilité blessée par la maladie et par les humiliations. Mais la grâce de Dieu lui a permis d’en faire lentement l’expression de sa foi. La formule en effet s’harmonise très bien avec ces mots de saint Paul : ” Si quelqu’un se croit quelque chose, alors qu’il n’est rien, il se fait illusion à lui-même ” (Gal 6,3). En écoutant ces mots : ” Je ne suis bonne à rien “, nous savons un peu mieux ce que croyait Bernadette.

Quand Dieu veut combler une âme, il commence par la dépouiller ; il en fait un vase vide, capable de recevoir, dans sa totalité, le don de Dieu.

Les bonus : Ce que Dieu m’a dit le 2 janvier 2025 à 6h du matin… #ndml